La question des faux moudjahidine est revenue sur le devant de la scène avec les témoignages d'Ahmed Bencherif qui avait lancé un cri d'alarme pour faire la chasse aux faux moudjahidine. Ce dossier remonte aux années 1980 où le ministre des Moudjahidine de l'époque, M. Djeghaba, avait officiellement et pour la première fois reconnu devant l'APN l'existence de faux moudjahidine, révélant que les services du ministère ont radié quelque 12 000 faux moudjahidine de leurs listes. Depuis, ce dossier est remisé au fond du tiroir pour réapparaître ces toutes dernières années grâce aux témoignages d'anciens moudjahidine courageux qui œuvrent en dehors des structures organiques des moudjahidine en vue d'assainir les rangs des moudjahidine. L'enjeu que représente ce dossier est si important que le sujet est devenu tabou et un véritable casse-tête pour les autorités. Parce qu'on a manqué de courage politique pour ouvrir cette boîte de Pandore, on en est arrivé à des polémiques du genre de celles auxquelles on avait assisté avec les déclarations de Moumen Khalifa qualifiant d'« imposture » la participation de Bouteflika à la Révolution. Se pose alors la question de savoir pourquoi les pouvoirs publics se montrent-ils aussi rétifs à donner un vigoureux coup de pied dans la fourmilière, se contentant seulement de professions de foi sans lendemain ? On attend peut-être la disparition des vrais moudjahidine pour enterrer définitivement ce dossier ! Tout laisse à penser dans la démarche des pouvoirs publics qu'il y a des milieux qui cherchent manifestement à gagner du temps pour évacuer le sujet et maintenir le statu quo actuel. Il ne s'agit quand même pas de déplacer des montagnes ! L'administration a des outils, des archives et des témoins encore en vie sur lesquels elle peut s'appuyer pour réaliser cette opération de salubrité publique et de réappropriation de la mémoire nationale souillée par des comportements opportunistes qui ont fait autant de mal à la Révolution que les harkis. Il faudrait peut-être envisager de mettre en œuvre une politique de rahma à l'égard des faux moudjahidine qui accepteraient de leur propre gré de faire amende honorable et de restituer leur carte de moudjahid. Et à l'inverse durcir les sanctions à l'encontre de ceux qui continuent de s'obstiner à se cacher derrière leurs masques de moudjahid. La solution la plus radicale résiderait-elle dans la fin des privilèges accordés aux moudjahidine ? En effet, il y a fort à parier que de nombreux moudjahidine — aussi bien les vrais que les faux — n'hésiteront pas à abandonner leur statut de moudjahid s'il n'y a plus de prébendes à distribuer. Le président Bouteflika avait jeté un pavé dans la mare en appelant dans un de ses discours à la nécessité de passer de l'ère de la légitimité révolutionnaire à celle de la légitimité constitutionnelle. Les actes tardent à venir.