Mercredi, à Sidi Ben Adda, une agglomération à 1 km à vol d'oiseau de Aïn Témouchent, selon divers témoignages, après la prière du maghreb, une cinquantaine de personnes sortant de la mosquée, figures voilées, aux cris de « Allah akbar », s'est dirigée vers le restaurant-bar le Tam Tam pour le saccager. Les assaillants ont commencé par incendier des pneus sur la chaussée ainsi que deux véhicules en stationnement, une Clio et une Hyundai, pour ensuite sortir les caisses de bière et se déchaîner sur les bouteilles. D'autres casseurs s'en étaient pris au mobilier et à l'équipement de l'établissement, le dévastant totalement. La gendarmerie est alors intervenue pour empêcher son incendie. Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, des brigades antiémeute avaient déjà quadrillé le quartier. Il n'y a pas d'échauffourée, la population ne s'étant pas impliquée dans l'expédition punitive. Du près du demi-millier de personnes sorties voir le spectacle, il n'y a plus que quelqu'unes qui observent de loin. Lorsqu'on les approche, certaines se mettent dans un coin en se cachant le visage. La rue, qui constitue une partie de la RN96 est jonchée de décombres calcinés. On charge les deux véhicules calcinés sur un semi-remorque. Un camion de l'APC rempli de débris rebrousse chemin après avoir aperçu au loin des individus jeter sur la route des tessons. Il change de direction et emprunte la RN35. C'est curieusement un élu de la commune voisine de Aïn Témouchent qui supervise le nettoyage de la voie publique par ses agents. Un calme tendu règne. Selon les informations recueillies, ce soir-là, le restaurant-bar était fermé. Il n'y avait que le gérant et le videur qui, voyant les envahisseurs arriver, ont pris la fuite. Deux voisins du lieu du sinistre nous abordent pour accuser de tous les péchés leurs vis-à-vis. Ils affirment que le wali a été sollicité, en vain, il y a deux semaines, pour la fermeture du Tam Tam alors que les gendarmes faisaient preuve de laxisme. Interrogés sur le fait de savoir s'ils avaient saisi la justice par un dépôt de plainte pour tapage nocturne, ils disent ne pas croire en elle. Pour eux, le Tam Tam jouit « d'une protection » grassement rétribuée. Ils nient que le coup soit parti de la mosquée, mais face à l'évidence des faits, ils se rétractent pour dire qu'ils n'ont rien vu sur la façon dont les choses se sont déroulées. Un fait prémédité Toujours est-il que beaucoup de monde savait ce qui allait advenir, à commencer par le gérant qui, ce soir-là, a fermé son débit. Selon nombre de témoignages, le bruit à propos de l'attaque circulait cinq jours avant. Pour d'aucuns, le fait que cette affaire se produise à Sidi Ben Adda n'est pas fortuit alors qu'en bien d'autres agglomérations de la wilaya, il existe des bars-restaurants qui, malgré tout ce qu'on leur reproche, n'ont jamais été l'objet d'une quelconque attaque. A cet égard, il y a lieu de rappeler que le Tam Tam, situé auparavant à l'extérieur de la localité, s'est trouvé enchâssé dans le tissu urbain du fait du boom urbanistique qu'a connu la localité. Il s'est même trouvé qu'une mosquée a été érigée à sa proximité. L'établissement est ainsi devenu l'objet de toutes les tensions à des périodes « sensibles » dans une commune demeurée électoralement acquise à l'islamisme depuis 1991, avec actuellement une majorité de ce courant à l'APC. Mais ce n'est pas tant pour cela que l'attentat perpétré est signé. Il l'est surtout pour avoir été engagé par ses commanditaires à partir d'une mosquée. C'est la deuxième fois qu'une telle signature est apposée, la première l'ayant été en novembre 2002, par sa coïncidence avec le premier jour de Ramadhan, alors que l'établissement était fermé. Hier encore, les gendarmes étaient toujours déployés sur les lieux alors que huit personnes ont été arrêtées.