Tout ce que La Casbah a d'enfants, de jeunes et d'hommes s'est retrouvée vendredi soir à la rue Ali Amar (ex-Randon). Des milliers de personnes se bousculaient ainsi sur cette route, désormais bien implantée dans ce qui est convenu d'appeler le commerce informel des produits pyrotechniques. L'occasion n'est pas fortuite : il s'agit de la célébration du Mawlid Ennabaoui, officiellement fêté hier. Quasiment fermé à la circulation automobile, cet axe routier a aussi posé beaucoup de problèmes quant aux déplacements à pied. Un sentiment de panique et d'agitation s'est emparé des foules. « Les visiteurs » étaient à la recherche d'une bonne occasion d'achat en gros et les vendeurs tablaient sur l'épuisement rapide de leurs stocks. Le centre-ville a connu cette fin de semaine une explosion, non pas des pétards, mais du négoce informel. La rue Bouzrina a repris son ancien statut de marché illégal. Elle a été occupée, durant la journée de jeudi, par les marchands d'effets vestimentaires. Vendredi soir, la circulation automobile sur l'axe Larbi Ben M'hidi-Bouzrina était très pénible, eu égard aux marées humaines qui ont envahi la chaussée et les trabendistes squattant les trottoirs. A la rue Patrice Lumumba, c'était la ruée : les gens couraient dans toutes les directions. Il y avait ceux qui se dirigeaient vers le marché de gros des produits pyrotechniques (Ali Amar) et ceux qui étaient de retour. A partir de 20h, la célébration à l'algéroise du Mawlid Ennabaoui a commencé. L'ex-rue Randon a été décrétée « zone autonome » assurant l'approvisionnement en arsenal guerrier. Il s'agit d'éviter surtout de refaire le scénario 2006, où plusieurs blessés ont été dénombrés dans des explosions en séries dévorant des dizaines d'étals bien fournis en pétards. Ici, on se contente donc de lancer des feux d'artifice sous l'acclamation des présents, à l'exemple de l'ambiance des stades. Le rite religieux a été différemment célébré, suivant les rues de la ville. Du côté de Larbi Ben M'hidi, à hauteur de la rue Boumendjel, ce sont surtout des femmes qui s'attaquaient aux passants en leur lançant des double-bombes. Les assauts, plusieurs fois répétés, ont obligé les trabendistes de la cigarette et des cacahouètes à plier bagages et rentrer. Les attaques étaient encore plus intenses en pleine rue Ahmed Chaïb (anciennement rue Tanger) à Alger-Centre. A la Basse-Casbah, c'était une autre bataille : les habitants s'entretuaient en se lançant les pétards à travers les fenêtres et les balcons à Bab Azzoun et Amar El Qama. Il demeure que c'est la place des Martyrs qui a réussi à créer un véritable climat de guerre. Les explosions, qui se sont prolongées tard dans la nuit de vendredi à samedi, ont fait vibrer les murs fragiles des constructions de l'ancienne ville, sous les acclamations, entre autres, de « vive l'Algérie ! » Cette manière de célébrer un rite a beaucoup étonné les ressortissants étrangers (africains) établis dans les dortoirs de Ketchaoua. Bilan : 16 incendies se sont déclarés suite à l'usage des pétards, selon la Protection civile sans faire de blessés. Plusieurs personnes ont été admises aux hôpitaux, mais aucun décompte officiel n'a été rendu public.