Les candidatures indépendantes aux prochaines élections législatives semblent susciter un, réel engouement en dehors des partis structurés. Voire même jusqu'au sein des formations politiques qui ont vu émerger de leurs rangs des candidatures « indépendantes » qui ont dû changer de monture à la dernière minute après avoir été rejetées des listes de leurs partis ou classées dans des positions peu avantageuses à leur goût dans la hiérarchisation des listes électorales. Les islamistes du parti dissous ne sont pas les seuls à être séduits par cette formule qui attire tous les candidats en rade du paysage politique intéressés par un poste de député, qui pour porter un projet politique comme c'est le cas des islamistes exclus du jeu politique, qui par pur opportunisme, pour fructifier leurs affaires en utilisant le Parlement comme tremplin. SENSIBILITES ET PLURALISME Au milieu de ces extrêmes il y a probablement des candidatures saines et politiquement correctes qui voient leur entrée au Parlement comme un acte de civisme politique et de citoyenneté au service de la collectivité. C'est un choix qu'il faut respecter comme il faut respecter la position de ceux qui ont appelé au boycottage de ces élections. Les candidatures indépendantes qui se sont multipliées dans la perspective des prochaines élections législatives commencent sérieusement à inquiéter les partis politiques traditionnels, y compris les formations qui ambitionnent de jouer les premiers rôles au prochain rendez-vous électoral. Des voix s'élèvent pour dénoncer le parasitage de ce scrutin et la perversion des règles du jeu électoral. Il est vrai qu'un bilan sur la question des candidatures indépendantes s'impose aujourd'hui pour apprécier cette expérience qui a tendance à être abandonnée dans les systèmes démocratiques où la compétition électorale est l'apanage exclusif des partis politiques. D'aucuns se posent la question de savoir s'il est humainement et politiquement possible de mettre sur pied un groupe parlementaire cohérent, homogène et qui parle d'une seule voix avec des élus qui viennent des différentes wilayas du pays — et qui ont par conséquent des préoccupations différentes — et des sensibilités politiques tout aussi plurielles ? Si la discipline partisane permet aux partis politiques d'arbitrer et de régler les manquements aux règles consensuelles établies qui peuvent surgir au sein d'un parti, les désaccords ou l'absence de consensus qui peuvent naître au sein du groupe parlementaire des indépendants sont plus difficiles à trancher. Des situations de blocage du fonctionnement du groupe peuvent ainsi surgir. Le recours aux alliances, à la pêche aux voix sur des bases qui ne sont pas toujours objectives lors des opérations de vote constitue un sport favori pour ce groupe parlementaire. LA CONCURRENCE DELOYALE DES ELUS INDEPENDANTS Le législateur a introduit dans le système électoral les candidatures indépendantes pour permettre une plus large représentation et représentativité du corps électoral et de la société. L'idée, à proprement parler, est louable et politiquement généreuse en ce sens qu'elle permet par le truchement des candidatures indépendantes à une frange de la société, qui ne se reconnaît pas dans les projets politiques des partis qui existent sur la scène politique, de se faire représenter dans les institutions élues comme le Parlement. Les personnalités et les représentants de la société civile qui privilégiant l'action en dehors des carcans partisans auraient pu investir puissamment ces espaces et ces tribunes pour porter les préoccupations et les aspirations des citoyens qui refusent de se faire embastiller par les partis. L'expérience passée a prouvé le contraire. Les personnalités qui jouissent d'une certaine respectabilité et qui ne sont pas dans les partis politiques ne sont pas plus attirées par cette forme de représentation de la société civile au Parlement qui nécessite aujourd'hui une sérieuse réflexion pour l'adapter aux nouvelles donnes politiques. Les partis politiques, pour d'autres raisons que l'on devine aisément, sont les premiers à appeler au démantèlement des candidatures indépendantes. On y voit une concurrence déloyale de la part des élus indépendants qui n'ont de comptes à rendre à personne alors que les partis politiques subissent de manière implacable la sanction des urnes. On met en garde contre le dévoiement de l'action politique par les milieux de l'affairisme que l'on suspecte de parrainer les candidatures indépendantes. Il y a, certes, du vrai dans ce procès qui est fait aujourd'hui aux candidats dits indépendants. Mais la même remarque ne vaut-elle pas également pour les partis politiques ou du moins pour certains d'entre eux qui font aujourd'hui beaucoup de bruit pour appeler à la moralisation de la vie politique et de la compétition électorale ?