Dans les cybercafés, le silence est requis pour permettre la concentration des usagers des PC, pris par leurs contacts professionnels, discussions et échanges d'idées par le biais du virtuel. Chacun a les yeux fixés sur son ordinateur. Rares sont ceux qui interrompraient leur voyage à travers le son et l'image pour entamer un dialogue avec le voisin d'à côté. Le même comportement est adopté à la maison par le mari ou par les enfants. Les rapports familiaux et amicaux se disloquent au fil des jours pour se raréfier. Les bonnes habitudes se perdent au gré des heures passées devant le petit écran à faire le chat à la recherche de ce contact lointain, là-(bas, quelque part au bout du monde. On s'oublie et on oublie le monde qui nous entoure, de pourvoir au minimum qui fait la vie en société. Tap, tap et retap, le clavier du PC se transforme en une langue aux lieu et place de la voix. En l'absence d'un headphone et microphone, celle-ci se perd dans les lettres et les chiffres transmis à l'intention de celui ou celle, à l'autre bout, pris dans le même engrenage. Les yeux se brouillent et l'esprit perd parfois la notion du temps et de l'espace. On devient de plus en plus accro de « Skype », « MSN » ou encore « Camfrog ». Comme une drogue, beaucoup ne peuvent éviter de le manipuler à longueur de journée et parfois même de la nuit. Et si les relations avec l'extérieur, notamment avec les voisins et les amis, s'effilochent, à la maison, c'est parfois le drame. Combien de familles se sont trouvées face à des problèmes de plus en plus compliqués parce que non pris en charge à temps. Combien de couples se sont séparés parce que les uns ou les autres ont préféré la compagnie du PC aux discussions à deux ou plus qui consolident souvent les relations des hommes et des femmes et qui permettent de mieux asseoir la compréhension de l'autre. Très utile, certes, le PC utilisé avec abus se transforme presque en un dérivatif pernicieux qui nuit à la sociabilité. Pernicieux également et particulièrement en milieu professionnel. C'est, en tous les cas, ce qu'ont révélé de nombreuses études, notamment une étude britannique. Selon cette dernière, l'utilisation de l'informatique au quotidien nuit à la communication entre salariés, particulièrement au sein des services IT. Un phénomène qui affecte la gestion opérationnelle et, plus largement, le management. « La plupart des individus sont focalisés sur leur ordinateur lorsqu'ils sont au travail, au détriment de leur relation avec leurs collègues », explique un psychologue expert. Et plus l'utilisation de la technologie gagnera du terrain dans les entreprises, plus l'aisance relationnelle en pâtira, prévient cet expert. La multiplication d'écrans et d'interfaces de communication intermédiaires (intranet, messagerie instantanée, etc.) nuit à la qualité de la communication, isolant le salarié et compliquant du même coup les relations entre les personnes. Résultat : les échanges se raréfient, ce qui a des conséquences sur le stress et le moral. Le problème est patent pour certains métiers très consommateurs de PC connectés (centres de contact, services d'opérateur téléphonique, rédaction des journaux,etc.). L'entreprise moderne restera forte si elle dispose d'équipes homogènes et collaborant, et non d'une somme d'individus rivés à leurs écrans et leurs logiciels. Touchant donc tous les départements et toutes les fonctions dans l'entreprise, ce problème semble, cependant, prendre une plus grande ampleur au sein des services IT ou départements informatiques. « Les personnes qui y évoluent ont davantage besoin de se focaliser sur leur PC, et peuvent donc avoir pourtant le plus besoin de développer leurs compétences interpersonnelles », ajoute l'expert. Le fait est que cet usage trop intensif du PC et de ses dérivés et périphériques mobiles (PDA, BlackBerry...) agit comme un révélateur de problèmes ou carences plus profondes, qui touchent aux compétences nécessaires dans la vie quotidienne, et à des difficultés de management. Un élément capital lorsqu'on sait que pour près de neuf entreprises sur dix, l'expérience acquise par un responsable informatique leur importe plus que ses qualifications, d'après une étude de la British Computer Society (BCS). C'est-à-dire tout ce qu'un informaticien apprendra sur le terrain en se frottant aux réalités « métiers » de son entreprise, aux clients, à ses collègues, etc. Ceci explique aussi une tendance nette depuis 2002 dans les entreprises : tenter d'extraire les fonctions informatiques de leur périmètre strictement « techno » pour les insérer davantage dans le management opérationnel global de l'entreprise.