Dans le chapitre « Les leçons de l'histoire », rédigé en 2001 et publié en page 169 de son livre Réflexions sur le système éducatif, Tahar Kaci écrit : « L'école algérienne n'est pas sortie du néant. Elle n'est pas non plus le produit de l'imaginaire de quelques concepteurs bien ou mal inspirés. Elle est le fruit du labeur quotidien de milliers d'anonymes, enseignantes et enseignants d'abord mais également pédagogues, constructeurs, gestionnaires. Elle est le produit de son histoire. Elle doit être analysée et évaluée en tant que telle. Quelles que soient ses insuffisances aujourd'hui, et elles sont nombreuses, il nous appartient de rendre justice à cette institution ainsi qu'à celles et ceux qui la font vivre. (…) L'influence du système scolaire colonial n'est pas, comme certains le soutiennent, essentiellement le fait de la langue, mais bien plus une question d'organisation et de fonctionnement. La mise en place d'un système éducatif adapté aux ambitions d'une révolution sociale nécessitait un projet nouveau. Or, la réponse aux défis immédiats a fait remettre à plus tard le problème. L'héritage de l'enseignement traditionnel (écoles coraniques, zaouïas et medersas) a également laissé ses empreintes. Essentiellement à vocation religieuse, cet enseignement a été traversé par des influences politiques et pédagogiques variées, souvent conflictuelles. Il ne constitue pas à proprement parler un système. Bien qu'auréolé par son action effective de conservation de la langue et des valeurs religieuses et culturelles nationales, cet enseignement ne constituait pas un système à même de prendre en charge une politique d'éducation nationale. Son éparpillement, ses conflits internes, le caractère traditionnel et limité de ses contenus et de sa pédagogie n'en faisaient pas une alternative pour une société en pleine transformation. Il a cependant marqué le développement de notre système éducatif, notamment dans certains de ses contenus d'enseignement et de ses orientations pédagogiques. (...) L'algérianisation du corps enseignant s'est faite progressivement, cycle après cycle. Cependant, le caractère massif des recrutements et de la formation, la dévalorisation de la fonction et la concurrence à l'emploi exercés par les secteurs économiques en plein essor n'ont pas permis d'asseoir une culture algérienne de l'école et une ouverture réelle sur la pédagogie moderne. Du travail a certes été accompli en matière de conception, de réalisation, et de distribution de moyens didactique. Cependant, ces efforts sont restés de simples soutiens techniques. Le caractère instrumental de ce soutien a même renforcé le conformisme de l'action pédagogique. La formation en cours d'emploi des enseignants a également préoccupé les dirigeants du secteur, mais là aussi les contraintes de gestion des carrières et de la promotion en ont réduit la portée. Ainsi, une pédagogie du modèle s'est peu à peu imposée, au détriment d'une culture pédagogique créatrice. » Tahar Kaci Extraits du livre Réflexions sur le système éducatif Edité par Casbah Editions en 2003