Les affrontements sanglants entre les partisans des deux principaux mouvements sur la scène palestinienne, le Fatah et le mouvement islamiste Hamas, ont repris de plus belle depuis les dernières 48 heures dans la bande de Ghaza. Il y a des morts, des blessés, des hommes armés cagoulés dans toutes les rues. Ghaza : De notre correspondant Des snipers sur les toits des bâtiments, des barrages dont on ignore l'identité de ceux qui les dressent, des hommes enlevés, les enfants et les étudiants qui n'ont pu rejoindre leurs établissements scolaires, des citoyens cloîtrés chez eux, sauf ceux atteints de curiosité maladive, des sirènes d'ambulance dans un va-et-vient incessant entre les zones d'affrontements et les hôpitaux, telle est la situation aujourd'hui dans la ville et dans différents lieux de la bande de Ghaza. Tout a commencé dimanche dans la journée avec l'assassinat de deux cadres des Brigades des martyrs d'Al Aqsa, branche armée du Fatah, à Beit Lahia, au nord de la bande de Ghaza. L'assassinat a été commis par des hommes masqués qui ont criblé de balles le véhicule à bord duquel circulaient Baha Abou Jarad et son compagnon. Le Fatah a accusé le Hamas, plus précisément les brigades Ezzeddine Al Qassam de ce double meurtre, ce qu'a infirmé le mouvement islamiste. Cet incident en a déclenché beaucoup d'autres à travers la bande de Ghaza. Un militant du Hamas et un journaliste proche du mouvement islamiste furent tués dans les heures qui ont suivi l'attaque de Beit Lahia. Des dizaines de personnes appartenant à l'un ou à l'autre des deux camps ont été enlevées durant la même journée. Dans la soirée, une réunion a regroupé deux délégations représentant le Fatah et le Hamas en plus de la délégation sécuritaire égyptienne présente en permanence à Ghaza, dans le but de faire cesser les hostilités qui plus le temps passait plus elles risquaient de devenir incontrôlables. Un accord a été conclu entre les parties rivales appelant à un cessez-le-feu immédiat, au retrait des hommes armés des rues et à la libération de tous ceux enlevés de part et d'autre. Mais comme c'était le énième accord du genre depuis le début des affrontements armés, ce dernier n'avait pas beaucoup de chance de réussir. Avant-hier, avant l'aube, quelques heures après la signature de l'accord et l'apparition des porte-parole des deux mouvements dans une conférence de presse conjointe, des dizaines d'hommes du Hamas ont attaqué le domicile de Maher Megdad, porte-parole officiel du Fatah, dans le quartier Al Nasr, au nord-ouest de la ville de Ghaza. Le domicile attaqué est situé dans un bâtiment où habitent environ 30 familles qui n'ont pu, ni les quartiers voisins, dormir à cause des tirs et des explosions. Deux des gardes de Megdad ont été tués dans l'attaque qui a signé la mort de l'accord visé par les deux mouvements quelques heures plutôt. Dans le quartier Al Nasr, les affrontements se sont poursuivis dans la matinée d'hier. Des militants du Fatah ont réussi à dominer un camp d'entraînement utilisé par des éléments du Hamas, situé à quelques dizaines de mètres du domicile de Megdad. Des responsables du ministère palestinien de la Santé nous ont affirmé que le dernier bilan provisoire des affrontements est de 7 morts et plusieurs dizaines de blessés dont certains ont été gravement atteints. Abou Mahmoud, voisin du porte-parole du Fatah, nous a déclaré : « C'est incroyable ce qui nous arrive. Mes enfants n'ont jamais eu autant peur, même lors des pires bombardements israéliens. Nous n'avons pas dormi de la nuit. Attaquer un bâtiment habité par une trentaine de familles est inconcevable quels que soient les motifs. Ni l'Islam ni aucune religion ne permet ces actes honteux. Et dire que ce sont des Palestiniens qui tuent leurs frères. Je ne comprends pas ce qui nous arrive, c'est une déchéance que personne ne pouvait prédire. Aujourd'hui je suis convaincu que personne ne travaille pour la patrie qui parait oubliée, alors qu'on entame la 60e année de notre Nakba (catastrophe) avec la proclamation de l'Etat d'Israël et l'exode forcé des deux tiers de notre peuple, transformés en réfugiés ici même en Palestine et dans les pays arabes voisins. » Les accords de La Mecque, signés en février, qui avaient mis fin à des mois d'affrontements entre les deux mouvements et la composition d'un gouvernement d'union nationale semblent lointains aujourd'hui.