Les nouveaux dirigeants d'El Islah qualifient la future APN de « CNT bis », le Conseil national de transition installé le 18 mai 1994. Le qualificatif émane précisément du secrétaire général, Djahid Younsi, qui a animé hier une conférence de presse conjointement avec le président du mouvement, Mohamed Boulahia, et le président du conseil consultatif, Djamel Soualeh. Mettant en avant le fort taux d'abstention, M.Younsi trouve que les élections législatives du 17 mai n'ont aucune légitimité populaire. « Les observateurs sont affirmatifs à dire que le taux de participation n'a pas dépassé les 20%. Et le parti le mieux placé a eu quelque chose comme 3% des voix exprimées », soutient-il, ajoutant que « les encadreurs ont gonflé le taux en faveur des partis de l'Alliance selon les quotas préétablis ». Il parle également de 21 walis qui auraient donné des instructions aux encadreurs pour agir en faveur des partis les mieux lotis. M. Younsi n'ira pas au bout de son idée et refuse de citer des noms. Il souligne cependant que plusieurs recours ont été introduits par le parti qui attend l'arbitrage du Conseil constitutionnel, présidé, faut-il le préciser, par Boualem Bessaïh, militant du FLN. S'il considère les dérives « extrêmement graves », le SG d'El Islah affirme l'attachement de son parti à la stabilité du pays et de ce fait, il ne demandera pas la dissolution de l'Assemblée. Mais la situation ne doit pas rester inchangée pendant cinq ans. Il suggère implicitement d'organiser des élections législatives anticipées. Mohamed Boulahia, qui préside aux destinées d'El Islah depuis avril dernier, revient sur la débâcle du parti, qui a perdu presque la totalité des sièges (43) qu'il a obtenus lors de ces législatives en 2002. Reconnaissant les insignifiants résultats enregistrés cette-fois-ci (seulement trois sièges obtenus sur les 389), M. Boulahia, qui se targue d'avoir « arraché » El Islah à son fondateur Abdallah Djaballah, justifie ce score catastrophique par la non- structuration du parti et la crise interne qui l'a secouée. Mais il refuse que ce soit lié à l'appel au boycott de l'ancien président révoqué, Abdallah Djaballah en l'occurrence. Pour étayer ses propos, il souligne qu' « en 1991, il (Djaballah) avait participé et obtenu 150 000 voix, en 1999, il avait participé à la présidentielle et obtenu 300 000 voix et nous avons obtenu 144 000 voix ». M. Boulahia explique la débâcle par le fait que le parti n'a jamais eu une « base stable ». La déroute d'El Islah rappelle néanmoins celle d'Ennahdha qui, après avoir éjecté Djaballah, n'a obtenu qu'un siège à l'APN en 2002. Abordant le conflit persistant entre la « nouvelle direction » et M. Djaballah notamment sur le siège national qu'occupe toujours ce dernier, Djamel Soualeh, président du Conseil consultatif, a indiqué que l'affaire, portée devant la justice, sera jugée le 23 mai. Il parle également d'un autre procès pour diffamation intenté contre M. Djaballah. Mais le plus grave, selon lui, est l'affaire concernant le compte courant du parti qui a été presque vidé par l'ancien président (Djaballah), lequel a retiré, affirme M. Soualeh, « près de 10 millions de dinars en une semaine ». L e président du Conseil consultatif a également accusé M. Djaballah d'avoir créé par l'argent du parti une entreprise de transport en France et une autre à Djelfa ainsi qu'une entreprise de vente de matériaux de construction à Blida. « Les deux dernières, il les a créées au nom de ses gendres », atteste-t-il, arguant avoir des « dossiers complets » qui seraient remis à la justice.