Juste après l'élection présidentielle du 8 avril dernier, une rencontre secrète a réuni Abdallah Djaballah avec des représentants du Pouvoir (dont un ancien ambassadeur) pour discuter de l'octroi de trois portefeuilles ministériels dans le gouvernement d'Ouyahia. Le président d'El Islah a insisté pour que ce soit lui qui désigne les trois prétendants, alors que les représentants du Pouvoir lui avaient proposé d'autres noms parmi les cadres d'El Islah. Cette information a été révélée, hier, par Mohamed-Djahid Younsi, ancien membre du bureau national d'El Islah, lors d'un point de presse animé conjointement avec cinq autres dissidents du parti au Centre international de presse (CIP) à Alger. Younsi précisera, en outre, que Djaballah a voulu placer ses amis dans des postes ministériels sinon il n'accepterait pas l'offre que son parti soit représenté dans le gouvernement. Plus grave, d'après Younsi, le fait que « cette rencontre n'a été portée à la connaissance des dirigeants et des cadres d'El Islah que récemment, et ce, grâce aux aveux du propriétaire de la maison où a eu lieu le contact entre Djaballah et les représentants du Pouvoir ». Prenant le soin de signaler que les dissidents « n'ont pas de problèmes personnels avec Djaballah », Mohamed Boulahia, président du majliss echoura (conseil consultatif), reviendra sur l'autoritarisme et l'unilatéralisme de Djaballah dans sa manière de diriger cette formation politique. Il révélera qu'une action en justice a été engagée contre le président d'El Islah. L'objectif poursuivi à travers cette démarche est, selon Boulahia, la réappropriation du parti afin qu'il soit doté d'une direction collégiale et qu'il fonctionne sur la base de la choura (consultation). Il indiquera que des efforts de médiation ont eu lieu, ces derniers mois, pour désamorcer la crise entre les deux parties, en vain. Car, selon Djamel Benabdeslam, Djaballah a tout fait pour torpiller ces efforts en tentant d'isoler les cadres du parti qui lui étaient trop critiques. A ce sujet, Mustapha Benbekhma notera l'humiliation qu'ont dû subir certains membres d'El Islah de la part de Djaballah et les menaces proférées contre d'autres, notamment les responsables du parti au niveau local comme les présidents des APC. Quant à Miloud Kadri, chef du groupe parlementaire d'El Islah à l'APN, il avouera que les députés tentent de contenir cette crise, mais l'affaire n'est pas si simple dans la mesure où « Djaballah est le premier à favoriser la division parmi les rangs du parti ». C'est là que Djamel Benabdeslam interviendra : « Le cheikh veut une mainmise totale sur les structures d'El Islah. Pour cela, il s'est taillé 40 articles dans le statut et le règlement interne (en préparation) qui lui octroient de larges pouvoirs. Il a même prévu un conseil consultatif élargi. » C'est pour toutes ces raisons et d'autres que le mouvement de dissidence veut redresser la situation, dira Azzeddine Chiheb. Il annoncera que la mobilisation est des plus grandes dans les wilayas comme Annaba, Guelma, Souk Ahras, Batna, Biskra, M'sila, Djelfa, Bouira, Relizane ou Illizi. L'importance de cette mobilisation est à considérer par rapport à la tenue du premier congrès d'El Islah prévue pour les 29, 30 et 31 décembre 2004. Un congrès que préparent activement Djaballah et ses partisans si on se fie au programme des réunions du parti au niveau des différentes wilayas et qui seront entamées à partir de demain, et ce, jusqu'au 20 décembre.