Cela, afin de leur permettre de participer au plus grand évènement cinématographique, de rencontrer des réalisateurs et de travailler en ateliers dans la perspective d'un futur Festival international des jeunes espoirs qui devra se tenir à Bordeaux. Le réalisateur en herbe présentera son film, déjà sélectionné en compétition dans plusieurs festivals internationaux du court métrage de fiction (Tanger, Aix-en-Provence, Montréal…) et projeté dans des salles d'art et d'essai. Les baies d'Alger ne raconte pas de manière classique la capitale du cardinal du chaâbi, El Hadj M'hamed El Anka. Il la fait découvrir en cascades dans une esthétique de la vitesse absolument hallucinante. C'est le choc des images qui fait le lien entre les séquences filmées et non pas le déroulement de l'histoire contée. Il n'y a, d'ailleurs, pas d'histoire au sens traditionnel du terme. Pour exprimer la ville telle qu'il la ressent, Hassen Ferhani filme des toits et des façades. Ce sont les fenêtres d'El Bahdja (d'où le titre « Les Baies ») qui racontent les vies dans la capitale. Des toits coiffés de paraboles, remplis de cris du voisin, du frère, fouettés d'intimités emprisonnées sur des routes aériennes que personne n'emprunte. Les Baies d'Alger peut aussi se décliner en « plaies » d'Alger, il y a de tout dans les images animées du jeune cinéaste, du songe et des vérités pas toujours aisées à déclarer…sur les toits. Il y a, particulièrement, cette envie de faire la chasse aux clichés et de montrer Alger d'en haut, l'Alger des buanderies et du cœur de la ville et non l'Alger d'Hydra la protégée. En reliant les fenêtres les unes aux autres, en les transposant les unes sur les autres en plongée continue, le cinéaste, inspiré, a pu transcender les lois établies du dialogue cinéma pour n'insister que le sur le dialogue image, et c'est autour de cette idée qu'est construite la trame de l'œuvre cinématographique et c'est, précisément, à ce niveau de prise de plans que le film les Baies d'Alger est superbement rendu. Les acteurs sont invisibles sur images. Bouts de dialogues fuyants, violents, castrés, encastrés, voix machistes, hypocrites, plaintives, disputes en boucles mais aussi dialogues amusants. Ce sont les voix off qui se donnent la réplique et ainsi que l'a qualifié un professeur de cinéma, Les Baies d'Alger est une leçon de hors-champ admirable pour un débutant. Les images sont des murs qui parlent, des couleurs défraîchies qui s'annoncent. A sa manière, le jeune Ferhani (membre de l'association Chrysalide) nous fait part de son désir d'aller, au- delà de l'a priori, d'affronter frontalement les idées reçues en n'abdiquant pas devant les raideurs d'une société (la nôtre) qui continue de se voiler la face en niant ses laideurs. Ce qui est sûr, c'est que derrière toutes ses images, il y a une réflexion détachée sur la place de l'homme en société, l'homme suspendu, l'homme otage de ses fausses hauteurs. Subtilement, il a su ébranler nos certitudes, nous bousculer dans nos vanités, celles qu'on partage et souligner la diversité d'une société. Sa présence à la 60e édition du Festival de Cannes devrait le pousser à perfectionner davantage son talent.