Le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), Ali Yahia Abdenour, a appelé hier à la levée des mandats d'arrêt lancés contre cinq militants de son organisation et contre un citoyen de la wilaya de Ghardaïa. Les six mis en cause sont poursuivis dans l'affaire des émeutes survenues la semaine dernière dans la wilaya en question suite à une opération d'inspection effectuée par les agents de contrôle de la qualité et des prix. « On a affaire à des militants des droits de l'homme, pas à des voyous, ils ne constituent pas un danger. Il suffisait juste à la justice de les convoquer... Mais la justice est bornée, frappée de cécité », a indiqué le président de LADDH lors d'une conférence de presse, tout en exprimant son inquiétude quant à la dégradation des droits et des libertés dans le sud du pays, et ce, en raison de la chasse aux militants des droits humains déclenchée par les autorités locales. Exigeant le limogeage du wali de Ghardaïa, tenu pour responsable dans l'enlisement du conflit, Ali Yahia Abdenour s'est dit disponible à dénouer les problèmes « pacifiquement ». Encore faut-il que l'administration ne rejette pas les citoyens, a-t-il ajouté. Onze personnes ont déjà été condamnées en pénal à quatre mois de prison ferme dans le cadre de cette affaire. Leur procès en appel devrait se tenir dans une ou deux semaines. Les chefs d'accusation les plus lourds pèsent sur onze autres prévenus, poursuivis au criminel pour « incendie volontaire », « obstruction de la voix publique », « port d'armes blanches ». « Conséquence de l'état d'urgence » Tout en remettant en cause les charges qui pèsent sur ces derniers, la LADDH demande leur mise en liberté provisoire. Revenant sur les circonstances ayant conduit au déclenchement des émeutes, l'avocat Hocine Zehouane a précisé : « Une descente de fonctionnaires chez les commerçants pour demander des factures, cela paraît une opération des plus légales. Mais concrètement, nous sommes dans un pays où le commerce se fait sans factures. » M. Zehaoune a aussi ajouté que les fonctionnaires n'ont pas inquiété durant leur « descente sélective » les vendeurs à la sauvette ou encore les grossistes. C'est ce qui a provoqué, selon lui, la colère des commerçants. Pour l'organisation de défense des droits de l'homme, ce type de soulèvements est une conséquence directe de l'état d'urgence instauré depuis 1992. « Tant que l'état d'urgence reste en vigueur, il n'y aura pas de libération des champs politique et médiatique (...). Quand les jeunes ont des problèmes à exposer, l'administration ne les reçoit pas, leur dernier recours demeure la rue », a déclaré Ali Yahia Abdenour. Selon lui, l'effectif de la gendarmerie est passé entre 1992 et 2000 de 16 000 à 103 000, et celui de la police de 21 000 à 120 000 pour la même période. Le président de la LADDH a estimé que les dépenses de l'Etat doivent être destinées en priorité à l'éducation, à la santé et aux questions sociales.