L'avocat appelle à la levée du mandat d'arrêt lancé contre ses militants et les protestataires à Ghardaïa. Avec l'habituelle verve qu'on lui connaît, Me Ali Yahia Abdenour, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme, est monté, hier, au créneau pour dresser, à la veille de la célébration du 50e anniversaire de la Révolution, l'évolution de la situation des droits de l'homme. Tirant prétexte des événements qui ont opposé violemment, ces derniers jours, les jeunes de la vallée du M'zab aux forces de l'ordre, l'avocat s'est lancé dans une véritable diatribe contre l'administration centrale, incarnée par le ministre de l'Intérieur, que ce dernier compare à un «sergent chef recruteur des maquis». Car, au lieu de tendre l'oreille aux revendications sociales et tenter de trouver des solutions aux problèmes posés, le ministre, l'état d'urgence aidant, s'est rendu coupable en mettant en branle sa machine répressive pour en venir à bout et pousse ainsi les contestataires, très souvent, à des situations extrêmes. Pour donner la dimension voulue à ses propos, l'ancien avocat du FIS indique que le nombre des éléments de la Gendarmerie nationale est passé de 16.000 membres en 1992, à 103.000. Celui de la «police d'Etat» a atteint les 120.000, alors qu'en 1992, il ne dépassait pas les 21.000 agents. Une armada dont la charge financière pèse de tout son poids sur le cours des dépenses publiques. Plus loin, il s'interroge: «Pourquoi avec tant de forces, on n'arrive toujours pas à éliminer les 400 terroristes toujours présents dans les maquis?» De là, le président de la Laddh parle de l'interdiction des manifestations publiques et s'en prend, non sans virulence, aux pouvoirs publics, coupables de maintenir sous le prétexte du terrorisme l'état d'urgence et ce, depuis le 9 février 1992. Une mesure qui a, selon lui, contribué fortement au verrouillage des libertés publiques et à la désagrégation des droits de l'Homme. Ce faisant, il affirme que pour empêcher toute manifestation, les pouvoirs publics ont mis sur pied, dans chaque wilaya, un dispositif de sécurité et de renfort très important. Réagissant, de ce fait, aux événements qui ont secoué, durant les derniers jours, la paisible ville de Ghardaïa, Me Ali Yahia, sans ambages, accuse le wali et le rend responsable de l'envenimement de la situation, car «il a refusé de recevoir les commerçants contestataires désireux, pourtant de transmettre leurs doléances à ce dernier». De son côté, M.Guennane, membre de la Laddh, citant un compte-rendu exhaustif établi sur les lieux du drame, affirme que la comdamnation des 11 personnes à quatre mois de prison pour «attroupement illégal et incitation à la révolte», a eu lieu à la cour. Les vingt autres inculpés pour «port d'armes blanches et incendies prémédités» sont actuellement entendus, dans le cadre de l'enquête judiciaire, par le juge d'instruction et dit avoir eu l'information que les procédures du jugement seront accélérées pour que leur procès se tienne juste après le Ramadan. Quant aux autres personnes, dont des éléments de la Ligue qui ont fait l'objet d'un mandat d'arrêt, Me Zahouane, vice-président de la Laddh s'indigne et s'interroge sur l'utilité d'un tel recours, «sachant qu'une simple convocation par le juge aurait suffi à régler le problème». «Nos militants ne sont pas des voyous pour mériter un tel traitement. Ce sont des gens éduqués et cultivés», a-t-il ajouté en critiquant le recours systématique à l'emprisonnement dont font montre les magistrats. Pour conclure, Me Ali Yahia Abdenour appelle à faire de la célébration du 1er Novembre une occasion pour exiger plus de libertés après avoir obtenu la gloire. Il a lancé, à ce titre, un appel pour la libération de tous les détenus d'opinion.