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Francesco d'Errico. Chercheur à l'Institut de préhistoire et de géologie du quaternaire « Nos ancêtres portaient des parures de coquillages pour se distinguer »
Ce seraient les plus anciens bijoux au monde. Une équipe de chercheurs internationaux a découvert dans la grotte des Pigeons à Taforalt, au nord-est du Maroc, de petits coquillages marins perforés, datant de 82 000 ans. Or, jusqu'à maintenant, les scientifiques pensaient que l'utilisation de parures en Afrique du Nord était beaucoup plus récente… Le point avec Francesco d'Errico, un des chercheurs de l'Institut de préhistoire et de géologie du quaternaire à Bordeaux. Des parures fabriquées à base de coquillages ont déjà été trouvées en Algérie, sur le site de Oued Djebbana et en Israël. Cela signifie-t-il que les hommes préhistoriques de la Méditerranée orientale et méridionale partageaient les mêmes traditions ? Tout dépend de ce que l'on entend par « traditions ». On sait par exemple qu'ils n'utilisaient pas les mêmes techniques dans la taille des outils en pierre, mais que sur une large période, estimée entre 10 000 et 1000 ans, ils avaient les mêmes objets de parures. En quoi est-ce une découverte importante ? Avec l'art, les sépultures et l'utilisation de pigments, ces objets figurent parmi les indices les plus concluants de l'acquisition d'une culture matérielle symbolique beaucoup plus ancienne en Afrique qu'en Europe. Au contraire des Européens du paléolithique (à partir de 40 000 ans), qui s'en servaient comme marqueurs ethniques ou linguistiques, les parures de ces sites anciens sont plutôt des objets d'échanges. Comment savez-vous que ces coquillages étaient utilisés en parures ? On sait qu'ils n'ont pas été ramassés vivants, car on a trouvé à l'intérieur des bryozoaires (petits vers qui colonisent les coquillages morts), des microgalets et de minuscules coquillages encastrés à l'intérieur. On a aussi pu déterminer que les trous, à cet endroit et de cette forme, étaient rarement causés par l'érosion de la mer. L'usure de certaines parties du coquillage laisse également penser qu'ils ont été portés. Ils ont été par ailleurs colorés avec de l'ocre, absent des sédiments prélevés à côté des coquillages. Le site a-t-il révélé d'autres secrets sur nos ancêtres ? Oui. Des os de lièvre et de cheval ainsi que des outils taillés, en pierre, ont été découverts. Nos ancêtres chassaient donc pour manger. Contrairement au site de Skhul, en Israël, aucun reste humain ni sépulture n'a été trouvé, mais on pense tout de même qu'il s'agit des premiers sapiens.