Le plus ancien sanctuaire d'Arabie, datant de 3.500-3.200 avant notre ère et dédié à un mammifère marin très particulier, le dugong, a été découvert sur l'île d'Akab (Emirats arabes unis), à 50 km au nord de Dubaï, ont annoncé mardi dernier deux centres français de recherche. La mission archéologique française aux Emirats arabes unis et le musée de l'émirat d'Umm al-Quwain (EAU) viennent de mettre au jour ce site, le plus ancien dédié au dugong, selon des données publiées par la revue Antiquity et reprises par le CNRS et l'Inrap (archéologie préventive) dans un communiqué. Ce sanctuaire d'Akab, une île aujourd'hui déserte, apporte "les premiers éléments sur les rituels des sociétés côtières préhistoriques du Golfe", indique le texte. Il y a plus de 6500 ans, Akab était un village de pêcheurs de thon. On en a retrouvé les habitations circulaires et on a sondé au début des années 90 un "amas de dugongs", une structure en os provenant de ce mammifère marin (de son vrai nom "Dugong dugon") datant de 3500-3200 avant notre ère. L'animal, cousin du lamentin, existe toujours dans le Golfe. À l'âge adulte, il mesure jusqu'à 4m de long et son poids peut atteindre 400 kg. Sa chair, son huile et son cuir ont été longtemps exploités mais il est aujourd'hui protégé aux Emirats. D'abord considéré comme une aire de boucherie de cet animal, l'amas -une plateforme de 10 m2 et de 40 cm de haut- s'est révélé être une "structure aménagée". Elle regroupait les restes d'au moins une quarantaine de dugongs, datant (carbone 14) de la deuxième moitié du IVe millénaire avant notre ère, soigneusement calés et orientés sur deux niveaux. La densité du mobilier est exceptionnellement élevée: éléments de parure, outils, galets. "Tous ces éléments indiquent que l'aménagement et l'utilisation du monument d'Akab répondaient au IVe millénaire à des règles précises", estiment les archéologues, pour qui "l'ensemble concourait à une mise en scène à la fois spectaculaire et ritualisée d'un grand mammifère marin". "Unique au Moyen-Orient, le monument d'Akab n'a aucun parallèle au Néolithique dans d'autres parties du monde", note le communiqué. Des structures comparables, mais datant de quelques siècles à peine, sont attestées sur les côtes australiennes, où le dugong fait l'objet de rites pour s'attirer la bienveillance des dieux. Il peut jouer aussi le rôle de totem pour des clans pêcheurs.