C'est un passionnant regard en arrière que nous livre Rabah Amroun, président de l'Association nationale des victimes civiles de la guerre de Libération nationale, à la veille du 50e anniversaire du 1er Novembre 1954. Ainsi, ce chercheur et passionné d'histoire indique, d'emblée, que les 21+1 ont décidé de déclencher la Révolution afin de dépasser les luttes intestines qui minaient le mouvement national. A cette époque-là, poursuit-il, la Kabylie et les Aurès vivaient depuis des années dans la clandestinité et étaient impatientes de voir tous les Algériens prendre les armes. Didouche et Ben M'hidi ont tenu, d'après Amroun, à rappeler que sans l'union avec la Kabylie, la Révolution ne sera jamais déclenchée. En septembre 1954, la Kabylie est désignée comme la zone III en plus des 5 autres zones. Durant la nuit du 31 octobre 1954, plusieurs attentats, attaques et actes de sabotage ont eu lieu dans les différentes zones. Selon Amroun, le nombre des éléments armés est estimé comme suit : 300 à la zone I, 100 à la zone II, 500 à la zone III, 60 à la zone IV, 50 à la zone V. Amirouche et l'opération des bleus La riposte fut terrible : massacre des civils, viols de jeunes filles, bébés jetés dans le feu... A partir de 1956, la nécessité d'organiser la Révolution se fait de plus en plus ressentir. D'après Amroun, les effectifs annoncés lors du Congrès de la Soummam sont les suivants : zone III (Kabylie) : 87044 militants FLN, 7470 mousseblin, 3100 moudjahidine. Zone IV (Algérois) : 40 000 militants, 2000 mousseblin, 1000 moudjahidine. Zone V (Oranie) : 1000 mousseblin, 1500 moudjahidine. Zone VI (Sud) : 5000 militants, 100 mousseblin, 200 moudjahidine. Zone II (Nord constantinois) : 5000 mousseblin, 1669 moudjahidine. Zone I (Aurès et Nememchas) aucun représentant. Par la suite, Amroun revient sur l'infiltration de l'ALN par les bleus, ce qui a ramené certains lieutenants et adjudants de l'ALN à demander à la population de n'avoir confiance qu'en les moudjahidine de leur village. Entre juin et juillet 1958, Amirouche a, dans le but de démanteler les réseaux des bleus, réuni au village Igoufaf tous les moudjahidine de la Wilaya III en demandant des volontaires pour créer un commando de la mort. Seuls, témoigne Amroun, trois moudjahidine ont accepté la demande. Il s'agit de Si Boussad d'Igoufaf, Si El Hocine d'Azazga et Boursas de Fort national. Dans le but de déstabiliser l'ALN, les services secrets français ont établi des listes de faux collaborateurs de l'armée française en ajoutant les noms de vrais bleus qui ont infiltré l'ALN. La liste parvenue à Amirouche, il a chargé le commando de la mort de livrer au poste de commandement de la Wilaya III les soupçonnés collaborateurs de l'armée française pour qu'ils soient interrogés. Selon le président de l'ANVCGLN, 800 moudjahidine, chefs de front, mousseblin et 400 civils ont été arrêtés et torturés souvent jusqu'à la mort. Les premières dérives A l'aube de l'indépendance, des collaborateurs de l'ennemi ainsi que des spectateurs pendant l'insurrection armée ont infiltré le FLN dès mars 1962 et fait disparaître les comptes rendus établis par chaque secteur pour la période de novembre 1954 à mars 1962. Des individus qui étaient des garde-corps des officiers de l'ALN ont rejoint l'armée française comme paras et sont reconnus aujourd'hui comme des moudjahidine. Des veuves de chouhada qui se sont remariées même avec des traîtres bénéficient toujours de leurs pensions. Après quoi, Amroun demande à ce que cette célébration constitue une opportunité pour l'engagement de chacun à reconnaître la vérité rien que la vérité. Qui a facilité aux traîtres et aux spectateurs d'infiltrer le FLN, l'UGTA, l'ONM et l'ONEC ? s'interroge enfin Amroun excédé.