L'entreprise de construction et réparation navale (Ecorep), qualifiée de fiable, n'existera plus à Jijel après la décision contestable prise en vue de sa liquidation par le conseil des participations de l'Etat. Outre les quarante-trois travailleurs de cette unité, c'est toute la wilaya de Jijel, qui recèle un littoral de 120 km et deux ports de pêche (Jijel et Ziama Mansouriah), ainsi qu'un troisième à El Aouana en projet, qui en pâtit. Depuis la mise en service du port de pêche de Boudis, tout le monde s'attendait au transfert de l'activité de cette unité de l'ex-port devenu zone militaire vers le nouvel abri. Vu l'utilité d'une telle unité pour une région côtière comme Jijel, même sa privatisation ne posait pas autant de problèmes, du moment que la wilaya continue de bénéficier de cette importante tradition de construction navale. Mais la réalité en a été autre. Par décision n°18 du 04/03/2007, le conseil des participations de l'Etat a pondu une résolution portant cession de la filiale Ecorep de Jijel au profit du ministère de la défense nationale. Ledit conseil autorise la fermeture du site situé dans l'enceinte du port militaire et le transfert de l'actif et du passif de l'Ecorep Jijel vers la filiale Ecorep de… Khemisti. Une décision vécue comme une injustice, privant 43 employés et autant de familles d'un emploi, et la région d'une activité ô combien bénéfique pour les professionnels de la pêche. La même décision permet l'octroi d'un montant de 30 millions pour prendre en charge le volet social de cette unité. Les choses se sont précipitées au courant de l'année 2006, quand la direction de la pêche de la wilaya de Jijel a saisi la direction générale de l'Ecorep, sommant la filiale du groupe à Jijel de quitter les locaux qu'elle occupe au niveau du port militaire. Dans une réponse au wali datée du 7 mars 2006, la direction générale de l'Ecorep a conclu que « ceci se traduit par une liquidation d'une entreprise publique et la mise au chômage de cinquante travailleurs » et d'ajouter que « dans la situation actuelle, l'Ecorep n'est pas en mesure de prendre en charge cette responsabilité lourde de conséquences ». La direction générale avait dans la même missive demandé la levée de la mise en demeure en attendant de mettre en place des dispositions pour évaluer les installations et le transfert du dossier au conseil des participations de l'Etat ; un transfert de dossier qui sera fatal pour les travailleurs de cette unité. L'assemblée générale extraordinaire du 30 mai 2007 entérine, dans une de ses résolutions, la dissolution anticipée de la filiale Ecorep Jijel, alors que le liquidateur installé pour terrasser définitivement cette unité a, dans une lettre adressée au syndicat de l'unité, informé ce dernier que « chaque travailleur émargera, soit à la retraite anticipée soit aux prestations de l'assurance chômage ». Quant aux indemnités de licenciement, le liquidateur ajoutera que « les travailleurs qui ne remplissent pas les conditions d'ouverture des droits à la retraite anticipée ou aux prestations de l'assurance chômage, bénéficient d'une indemnité égale à trois mois de salaire ». Cette situation, traumatisante pour les travailleurs de cette entreprise, a fait bouger le député du FLN, maître Mahfoud Oulmane. Dans une lettre adressée au président du conseil des participations de l'Etat, il demande une intervention urgente pour revoir la décision prise par le CPE en date du 04/03/2007. Le député du FLN relèvera que l'entreprise jouit d'une bonne santé financière, vu que jusqu'à sa dissolution, cette unité finançait les salaires d'autres unités relevant du même groupe. Il rappellera qu'initialement, l'Ecorep devait être transférée vers le nouveau port de pêche de Boudis, et regrettera qu'une aussi lourde décision ait été prise sans la participation des représentants des travailleurs. Il ne manquera pas de souligner l'absence, dans les dispositions d'indemnisation retenues, de la procédure du départ volontaire, comme cela avait été appliqué localement par l'Edimco, la tannerie de Jijel ou encore l'unité de réparation navale (URND) d'Alger. Dans sa conclusion, maître Oulmane qui précisera que cette liquidation n'a pas été décidée pour des raisons économiques, soulignera qu'à l'incapacité de l'entreprise de transférer son siège vers le port de Boudis, on a préféré « jeter des travailleurs à la rue et vouer ainsi leurs familles à la misère dans un proche avenir ». Questionné sur le sujet, maître Oulmane s'interrogera si la wilaya n'est pas en train de traverser une nouvelle phase qui consiste en le transfert des emplois, après celle des projets d'investissement.