C'est à travers la plus belle vitrine du Salon international de l'artisanat de Ouagadougou (Siao), qui se tient du 29 octobre au 7 novembre, que les artisans algériens ont fait leur entrée ce samedi. Quasi absents de la biennale à travers ses halls d'exposition classiques, ils étalent leur talent avec succès dans le pavillon « Design, made in Africa ». Une nouveauté du plus grand salon de l'artisanat d'Afrique et « un rêve » enfin réalisé pour son commissaire, Jean-Claude Bouda. Son intention : montrer que les artisans du continent peuvent allier tradition et modernité et faire évoluer les formes des objets de la vie quotidienne. Modifiant ainsi l'image habituellement véhiculée de l'artisanat africain. L'Algérie est le pays le plus représenté dans cette galerie de « l'excellence », avec l'Afrique du Sud et le Sénégal. Les œuvres de quatre de ses designers y sont exposées. Des objets usuels qu'il « leur a suffi d'épurer (...) pour les élever à un statut d'objets d'art », explique Karim Sergoua, plasticien et enseignant à l'Ecole supérieure des Beaux-Arts d'Alger (ESBA), dans le catalogue de l'exposition. Et comme le hasard fait bien les choses, en cette période de Ramadhan, toutes leurs œuvres se rapportent à « la table ». A commencer justement par la table basse de Mehdi Izemrane. « Inspirée de la meïda », elle est composée d'un plateau en verre et d'un tube métallique, en « tulipe », « qui suggère à l'utilisateur de s'asseoir en tailleur », explique son concepteur, diplômé de l'ESBA. Tout comme Amira Attallaoui-Deverchère, qui présente un « vitavapeur » en terre cuite vernissée, composé de deux pièces et posé sur une plaque électrique moderne. Une pièce d'une grande pureté dont les mets pourront être dégustés dans le service en terre cuite du céramiste Abdelaziz Bacha. C'est également assis en tailleur que Mohamed-Fayçal Guenni invite ses convives à prendre le dessert. Ses coupes sont enfoncées sur de minuscules tables en bois, peint en noir, et en céramique. Autant d'objets qui ne dépareillent pas, mis en scène dans des décors intégrant les pièces d'artistes zimbabwéens, congolais ou encore ivoiriens. L'exposition « Design, made in Africa », organisée en coopération avec l'Agence française d'action artistique (Afaa), va voyager dans une quarantaine de pays en Afrique, dont l'Algérie, mais également à Milan, Tokyo, Montréal, Paris... Et si le talent des jeunes créateurs algériens est reconnu à l'étranger, il semble l'être un peu moins dans leur pays. Faute de « structures spécialisées dans la production d'objets issus d'une recherche créative », ces derniers laissent leurs « projets à l'état de recherche virtuelle », se désole Karim Sergoua dans le catalogue de l'exposition. On peut également regretter la relative pauvreté du stand dont l'Agence nationale de l'artisanat traditionnel dispose dans le « Pavillon des exportateurs ». Des plateaux en cuivre y côtoient quelques faïences et tapis... sans vraiment attirer l'attention. Aucune trace de bijoux, de poterie ou de la richesse vestimentaire algérienne. « A chacune de nos participations (c'est la troisième, ndlr), nous essayons de donner sa chance à une spécialité », explique le responsable du site. Dommage, car le stand algérien avait été primé comme l'un des plus beaux (2e prix) de l'édition 2002.