Nos entrepreneurs sont-ils ces êtres sans cœur, froids et calculateurs, qui n'ont qu'un seul souci : se remplir les poches sans se préoccuper du reste, comme aiment à les dépeindre certaines autorités. Ces mêmes autorités ne sont-elles pas, elles-mêmes, obsédées que par une chose : la livraison des projets dans les délais ? Elles ont, un jour, prêté une oreille attentive à ces entrepreneurs et, en prenant connaissance de leurs doléances, les ont pris un instant au sérieux. Nous avons rencontré certains d'entre eux et écouté leurs préoccupations qui sont les mêmes. Tous se plaignent de la cherté des matériaux de construction (ciment, acier, etc.) et des charges fiscales écrasantes, alors que le prix du mètre carré bâti reste obstinément entre 18 000 DA et 22 000 DA. Aussi, un entrepreneur déclare ne rien gagner dans la conjoncture actuelle, car le sac de ciment coûte 800 DA alors que le quintal d'acier est de 5800 DA. Pour pouvoir s'offrir une marge bénéficiaire, l'entrepreneur doit prendre le marché à 28 000 DA le m2, déclare-t-il. Selon cet autre, le peu de facilité rencontré auprès de la cimenterie de Sour El Ghozlane constitue un manque à gagner estimé entre 5 et 6 millions, le camion envoyé pour charger le ciment peut rester une semaine et plus dans la file d'attente. Tous les entrepreneurs rencontrés s'accordent, par ailleurs, à dénoncer les avantages fiscaux et parafiscaux dont bénéficient les entreprises chinoises, sans parler de ceux qui leur sont octroyés en sus : le coût du bâti serait d'après leurs dires compris entre 34 000 et 46 000 m2. Ils obtiennent plus facilement les crédits auprès des banques et des avances tout en bénéficiant de meilleures conditions de sécurité, dénoncent-ils. « Qu'on nous donne tous ces avantages et nous répondrons des délais et des critères d'une bonne réalisation », réclame cet entrepreneur qui dénonce par ailleurs la concurrence déloyale des Chinois qui ramènent la main-d'œuvre avec eux. « Comment pourrons-nous bénéficier de leur expérience et de leur savoir-faire s'ils (les Chinois) n'emploient pas des ouvriers algériens ? », s'interroge notre interlocuteur. Il faut noter que les Chinois travaillent à Bouira pour la réalisation de 600 logements et emploient deux équipes sur leur chantier. A propos de leur compétence en la matière, l'un de nos interlocuteurs reste dubitatif. Pour lui, seule l'urgence induite par le programme présidentiel, qui prévoit à l'orée 2009 la réalisation d'un million de logements, a amené à attribuer aux Chinois des parts de marché dans le secteur du bâtiment. Leur savoir-faire n'aurait, à l'en croire, rien d'extraordinaire par rapport à celui détenu par nos entrepreneurs.