La non-actualisation de la nomenclature des actes médicaux a permis à de nombreux établissements privés de santé d'accumuler d'énormes bénéfices. La surtarification et la sous-facturation sont des pratiques courantes dans les cliniques où plusieurs pathologies sont prises en charge. Celles spécialisées dans la chirurgie dépassent le cap de l'entendement. D'aucuns estiment que le dysfonctionnement généralisé dans les hôpitaux publics a poussé les malades à aller se soigner dans ces établissements malgré le prix fort. Mais, il est clair, des centaines de malades sont encore pris en charge dans le secteur public avec des moyens des plus dérisoires. Des spécialistes en la matière ne cessent de tirer la sonnette d'alarme sur le développement mal contrôlé du secteur privé et l'ouverture anarchique de nouvelles structures. Cette désorganisation échappe à toute inspection des pouvoirs publics. Il est temps que la machine de la réforme du système de santé se mette en route. « Ces cliniques se développent essentiellement dans les disciplines commercialement rentables, comme la chirurgie, la maternité et dans certaines régions à forte densité de population », relève-t-on. Une prise en charge rapide est sûrement assurée dans ce genre d'établissements, mais il arrive souvent que des malades soient évacués d'urgence vers des hôpitaux publics pour des soins intensifs en raison du manque de moyens adéquats. Il faut dire que l'accès à ces établissements n'est pas à la portée des petites bourses qui prennent généralement leur mal en patience et attendent les « précieux » rendez- vous qui s'étalent sur des mois, voire des années. Dysfonctionnements « La clinique, établissement privé à but commercial qui reçoit une clientèle solvable et payante, va créer un nouveau phénomène de dualisme du système de santé en Algérie qui à terme risque de renvoyer l'hôpital public à une vocation d'assistance sociale et remet en cause le principe d'égalité aux soins que le système algérien a institué », est-il signalé dans le compte rendu préliminaire du Conseil de la réforme. Comme il est relevé dans ce rapport des dysfonctionnements au niveau administratif et médical en citant, entre autres, l'absence de cahier de charges pour ces établissements, absence de normes applicables au secteur hospitalier privé en termes d'organisation des activités médicales, la non-participation effective aux activités de prévention et l'anarchie dans les honoraires et les coûts des actes. Ces défaillances que subissent les malades sont connues de tous et les pouvoirs publics ne daignent pas mettre un terme à cette situation qui ne profite qu' à ces structures. Pis encore, les factures délivrées ne correspondent jamais au montant exact versé par les patients. Une situation à normaliser Les actes sont généralement sous-facturés. « Mon intervention m'a coûté 60 000 DA et la clinique a déclaré sur la facture seulement 10 000 DA et le remboursement par la sécurité sociale se fait sur la base des 10 000 DA. La clinique ne justifie même pas cette arnaque. », se plaint une malade prise en charge dans une des cliniques privées de la capitale. Le cas n'est pas isolé puisque plusieurs personnes ont été victimes de cette escroquerie « autorisée ». Outre les cliniques conventionnées avec la Caisse nationale de sécurité sociale, les coûts des actes diffèrent d'une clinique à une autre. « Les prix sont généralement exhorbitants. Le coût d'une simple intervention est de pas moins de 20 000 DA. Ces cliniques privées ont imposé leur pratique depuis des années et personne ne s'en soucie », ajoute notre interlocutrice. Dans le souci d'en savoir plus, nous nous sommes rapprochés de la direction générale de la CNAS qui nous fait savoir que ce dossier est géré directement par le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière chargé du contrôle et de prendre les mesures nécessaires. Le département de la Santé tente, depuis des années, de normaliser la situation comme cela est préconisé par la réforme mais mis en branle par l'ex-ministre Abdelhamid Aberkane. Il semble que le Pr Mourad Redjimi, l'actuel ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, compte mettre en application les recommandations du Conseil de la réforme concernant justement le secteur privé. L'actualisation de la nomenclature et la normalisation des prix sont les priorités de Redejimi qui soutient que les prix pratiqués dans les cliniques seront les mêmes que ceux des établissements publics de santé. « Une fois les prix normalisés, il ne sera plus question de payer plus cher la clinique privée ou le médecin privé. Quand une opération est évaluée à 30 000 DA, le prix à payer par le malade sera de 30 000 DA, aussi bien à l'hôpital qu'à la clinique privée. Le contrôle sera renforcé grâce aux inspecteurs qui existent dans chaque wilaya et les 350 autres inspecteurs qui sont en formation à l'Ecole nationale des gestionnaires » a-t-il déclaré dans une interview accordée au quotidien La Tribune.