La Fédération algérienne des associations de diabétiques (FAAD) s'est réunie jeudi dernier à l'hôtel El Djazaïr et a exprimé clairement son désaccord concernant l'autorisation donnée à Novo Nordisk, laboratoire pharmaceutique présent dans plusieurs domaines, notamment la diabétologie, d'importer de l'insuline. Mourad Ouhada, président de la fédération, a lu une lettre qu'il a adressée au ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Mourad Redjimi, dans laquelle il explique sans équivoque les raisons de cette hostilité. Pour lui, ce laboratoire n'a jamais tenu ses engagements en Algérie. La preuve, son ancien projet n'a pas été concrétisé dix-sept ans après l'intention de le lancer. « La disponibilité de l'insuline est une question de vie ou de mort. Nous ne défendons aucun laboratoire. Nous n'avons aucun problème avec le ministre, mais nous défendons les droits des malades qui en ont marre d'attendre le produit qui vient de l'extérieur. Nous avons été confrontés à des ruptures de stocks parce que le bateau n'est pas encore arrivé ou l'avion est en retard ou parce qu'il y a une grève de tel ou tel corps », a-t-il affirmé. Il faut noter que le nombre des diabétiques en Algérie se situe entre 1,2 et 1,5 million, dont 50% sont méconnus. Cette pathologie affecte 8% de la population algérienne, un taux qui doublera d'ici à 2010. Selon ses propos, « l'introduction de l'insuline de Novo Nordisk perturbera le malade. Ce laboratoire va l'importer de Tunisie ou du Maroc. » Il a clairement affirmé que si cette décision n'est pas revue, il appellera les malades à boycotter les produits du danois. Visiblement, les membres de cette fédération sont marqués par l'échec du projet de Tizi Ouzou. Slim Belkacem, représentant du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, a tenu à lever toute ambiguïté : « L'agrément a été donné dans le strict respect de la réglementation en vigueur. Il ne porte pas uniquement sur l'insuline, mais sur une grande gamme de produits fabriqués par Novo Nordisk, y compris des produits qui font actuellement défaut sur le marché national. Cet agrément a été donné sur la base d'un engagement ferme et écrit et une caution bancaire de l'entreprise concernée pour investir dans la création d'une usine de production de produits pharmaceutiques dans la zone industrielle de Oued Aïssi à Tizi Ouzou (elle ne concernera pas l'insuline), mais d'autres produits, y compris les antidiabétiques oraux et des produits relevant d'autres classes thérapeutiques. » Les délais pour la finalisation de cette usine sont de 12 mois avec un rapport d'étape tous les deux mois. C'est la condition du ministère pour que cet investissement ne connaisse pas le sort des engagements ultérieurs qui avaient été faits au nom de l'entreprise Adalph constitutée de trois partenaires : Novo Nordisk (Danemark), Pierre Fabre (France) et Saïdal (Algérie). 20 millions de dollars, soit le coût de l'usine, ont été versés aux banques algériennes. L'usine devait employer 100 personnes. Concernant la réglementation, Belkacem précise que c'est le fait que la plupart des importateurs n'ont jamais respecté le cahier des charges, qui stipule que l'exportateur doit investir dans un délai requis, qui a poussé l'Etat à retirer l'agrément à 26 opérateurs. L'usine d'insuline, selon les prévisions communiquées par les responsables de Saïdal au niveau du comité de suivi du projet, présidé par le ministre de la Santé, sera fonctionnelle au plus tard à la fin du premier trimestre 2005. Tant qu'un opérateur est en conformité avec la réglementation, il pourra importer des produits qui ne sont pas fabriqués localement. Quand Saïdal commencera à produire de l'insuline à Constantine et que sa production couvre l'ensemble des besoins nationaux, aucune insuline ne sera plus importée quel que soit le laboratoire. Le Dr Chakou Abdesslam de Saïdal a rappelé que « le projet sera réalisé avec les moyens propres de l'entreprise et avec le soutien technologique d'Aventis. Nous nous engageons pour que la première insuline algérienne soit sur le marché au premier trimestre 2005 ». Est-ce que cette décision ne va pas porter atteinte de manière directe ou indirecte au projet quant au partenariat entre Aventis et Saïdal ? Quel sera son devenir si, le jour où le médicament sera produit, le marché algérien est inondé insuline ? La priorité aujourd'hui n'est-elle pas de commencer à préparer le malade algérien à l'insuline que doit mettre Saïdal sur le marché ? Il reconnaît que, lors de la dernière rencontre qui a eu lieu à Sofitel à l'occasion de la Journée mondiale du diabète, « nous avons effectivement pris la décision de monter la première insuline algérienne, mais il n'a pas été question qu'elle sorte de Constantine ». Il précisera : « Nous nous sommes dit que nous disposons d'installations à Dar El Beïda qui nous permettaient de gagner des étapes dans la concrétisation de ce projet (contrôle de la qualité, maîtrise du conditionnement). Ça aurait été une phase pour nous pour raccourcir les délais du projet. » Selon lui, il y a une dizaine de jours, le PDG est allé à Constantine pour superviser l'état d'avancement de ce projet.« Nous ferons tout ce qu'il faut pour que nos engagements se réalisent à la condition que nous vous informions de l'état d'avancement du projet et des difficultés qu'on y rencontre », conclut-il. Rappelons que le ministre a déjà déclaré suite à cette affaire que « l'insuline de Saïdal sera protégée et privilégiée ».