L'ironie du sous-titre et, peut-être, son humour, ne devrait pas faire penser à une mésentente, une incongruité, une méconnaissance. Il affirme plutôt une trajectoire qui concerne ce que l'auteur de cet article est devenu après le 1 novembre 1954 et l'indépendance de l'Algérie ; les 3 mots, écrivain, psychanalyste, écologue nomme une trajectoire de liberté d'être et de penser ; cette trajectoire me ramène à une responsabilité de paroles et d'écritures, et, si j'essaie de penser aux motifs, engagements, qui ont fait de nous, à l'époque, des fabricants-ouvrières-ouvriers-de l'indépendance algérienne, je trouve une grande diversité de motifs : pour les uns, ce qui était non seulement espéré mais exigé, c'était la liberté d'expression, d'autres, c'était une revendication religieuse, l'islam, la religion, dite des Algériennes, des Algériens ; d'autres, de langue et de religion ; d'autres de nationalisme ; d'autres, d'émancipation planétaire ; d'autres contre le racisme, l'apartheid colonial ; d'autres une nécessité historique ; d'autres, une nécessité psychique - Fanon, par exemple - ; d'autres... ; et bien d'autres... On le voit, les motifs et les raisons étaient nombreux, nombreuses, divers,diverses, multiples, et, ils, elles, avaient, cependant, malgré la diversité, malgré la multiplicite - on pourrait dire même à travers leur diversité, leur multiplicité - ils, elles, avaient une finalité, un but commun, une convergence : en finir avec l'inégalité, l'injustice, l'arbitraire, l'humiliation coloniale ; ils, elles, revendiquaient une liberté pour les enfants, les femmes, les hommes, au-delà de l'aspect communautaire, social, coercitif, qui était, simplement, une reconnaissance et affirmation de droits pour toutes et tous, chacune, chacun - indépendamment de la couleur, du sexe, de la religion, de la langue, de la communauté de culture - conforme à la volonté des algériennes, des algériens de l'époque, pour créer un pays indépendant de la sujétion coloniale et, ainsi, créer un pays qui vivrait à partir des valeurs universelles, singulières, internes à une république et à une démocratie. Réfléchissons un peu : la république définit un lieu, un espace, une assemblée, un parlement, un conseil, une institution, où le soin à « la chose publique » la co-existence des citoyennes et des citoyens est prise en compte, assurée, et, maintenue : le pire, pour la république, étant la guerre civile. Il existe un contrat politique de maintenance de la paix civile à partir d'une reconnaissance des différences, diversités, et, pour employer un mot dont je discuterai le sens, minorités de langues, représentations, opinions, jugements. Alors, précisément : qu'est-ce que la démocratie ? Si l'on peut répondre : une république démocratique serait une république qui reconnaîtrait et donnerait sens dans « la chose publique », par « la chose publique », à la diversité, et, aussi, à la parole publique ; la démocratie, si elle est reconnaissance d'une fonction majoritaire, cette majorité - le terme de majorité - ne devrait plus être pensé comme référée à une valeur quantitative, mais à ce que, nous, psychanalystes, nous appelons l'infantile qui demeure en nous, c'est à dire, ce qui reste encore fixé au désir infantile immédiat : tout avoir tout et tout de suite et en imposer la loi, le désir à toutes et à tous. ; il ne s'agit plus de majorité-minorité, mais bien de majeur-infantile. Ce n'est pas vis à vis d'un contrat majoritaire quantitatif que se joue le sens de la majorité ; c'est en vis à vis de la violence du désir immédiat et de la méconnaissance des causes déterminantes de la co-existe civile ou du meurtre civil ; la politique, dans son sens nécessaire et éthique - pour que ça marche au-delà des catastrophes - est faite pour assurer cette co-existence dans la reconnaissances des droits, des sujets et des responsabilités. C'est pour cela - je puis le dire maintenant - et beaucoup d'autres disparus, aujourd'hui, femmes, enfants, vieillards, hommes, que j'ai été d'accord, que j'ai participé à la naissance d'une nation algérienne dans sa nouvelle histoire, son historicité actuelle et non passée ; ce qui voudrait dire : du passé, comme passé, que devrions-nous gardé, mettre en évidence pour assurer la co-existence actuelle des algériennes et des algériens en une paix civile reconnaissante des droits de chacune, chacun, de toutes et tous ? D'où de troisième terme : d'écologue. Si l'on pouvait penser la co-existence d'une façon écologique,- c'est à dire, non polluante, destructrice d'un environnement qui permettrait la co-existence civile, tiendrait compte des responsabilités, idées et pratiques, qui ont conduit à la mise en actes de massacres, assassinats, tortures, crimes de femmes, d'enfants, vieillards, hommes, - cela voudrait dire que nous ferions du passé, non pas « table rase », mais que nous lui donnerions une chance de co-exister, être, entre nous. Ce qui polluerait ainsi notre pays - en plus des malversations économiques et financières - c'est l'utilisation des passés enkystés, non développés, non assumés, non parvenus à leur majorité de souvenirs et de penser. Or, c'est contre ce pouvoir de se tuer les uns les autres dans des massacres organisés, des crimes programmés, des assassinats souhaités, par les uns et par les autres, qu'est née la nécessaire et éthique question de la co-existence politiques des êtres humains si différenciés, si singuliers dans leur création, et, si collectivement, oserai-je les mots, si individuellement, si majoritairement, si minoritairement, meurtriers. Alors ? Il serait temps, pour nous, de changer notre pensée de la majorité et de vivre cette nécessité politique de la re-conciliation politique pour construire un pays débarrassé des pollutions diluantes, délirantes, mégalomaniaque, criminelles, de la réalité civique et civile. En tant qu'écrivain psychanalyste écoloque j'aimerais bien participer à la dépollution ambiante, active, du politique, de l'économique, du culturel, du cultuel,du social , de l'Algérie actuelle, après cinquante années d'un type de pollution politique, dont on subit tous les effets, conséquences, partout, aujourd'hui. Par Nabile Farès