C'est sans trembler de la voix ni craindre de « prétendus » mécontentements futurs que le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, a fait hier une lecture froide des résultats de la 14e bipartite Ugta-gouvernement. L'accord conclu sans grande peine entre l'Exécutif et la centrale syndicale mérite, selon le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, le qualificatif d'« avancée qualitative » ou « significative » selon le patron de l'UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd. La nouvelle grille des salaires de la Fonction publique vient officiellement de voir le jour… ou presque car le dernier mot, dont se décharge habilement le chef du gouvernement, revient au président de la République… et aussi à des considérations d'ordre « technique ». Il s'agit en fait de la finalisation « avant la fin de l'année » en cours des nouveaux statuts particuliers inhérents aux corps des fonctionnaires. 45 statuts particuliers en tout. Le pari est plus que difficile à tenir mais tout n'est pas perdu pour autant. M. Belkhadem rassure : « Ce que je peux vous dire, c'est que tous les fonctionnaires et agents de la Fonction publique bénéficieront d'augmentations. Tous sans exception. Des augmentations qui varieront suivant les catégories et les qualifications énoncées dans les dispositions du nouveau système de rémunération. » Derrière un pupitre en bois rustique, le chef du gouvernement, qui animait à la fin des travaux de la bipartite une conférence de presse, déclare que dans le cas où les statuts particuliers ne seront pas prêts à la date indiquée, le gouvernement « proposera au président de la République une autre solution ». Un plan B sur lequel M. Belkhadem s'est révélé fin « économe » en explications et se contentera d'un : « Il sera annoncé lors d'un prochain Conseil des ministres. » La nouvelle grille des salaires de la Fonction publique, souligne M. Belkhadem, apporte des changements de fond par rapport à l'ancien système car, dit-il, elle ne « reconnaît qu'un seul paramètre déterminant, c'est celui de la qualification ». Ce nouveau système comporte un seul point indiciaire d'une valeur de 45 DA. L'ancienne grille comportait 78 valeurs indiciaires et prévoyait 20 catégories, tandis que la nouvelle en comporte 17 et 7 subdivisions annexes (hors catégorie), selon M. Belkhadem. Ainsi, l'éventail des salaires (fourchette entre les salaire les plus bas et les plus hauts) devient plus large (7,5% au lieu de 3,3%), ce qui va permettre « l'émergence de la classe moyenne », a-t-il expliqué. Elle sera adoptée lors d'un prochain conseil de gouvernement, « dans deux semaines », selon le chef de gouvernement. Le Conseil des ministres qui s'ensuivra offrira selon le calendrier tracé du moins l'occasion pour le président de la République de rendre son très attendu « verdict » sur ce dossier qui concerne plus de 1,5 million de travailleurs de la Fonction publique. A l'heure où le front social connaît une surchauffe et réclame la présence et la réaction du gouvernement, celui-ci s'efface presque entièrement et se réfère systématiquement à la « décision » du chef de l'Etat, y compris pour ce qui est de détaxer l'importation de la pomme de terre. De quelle marge de manœuvre peut donc disposer le chef du gouvernement pour régler les questions sociales les plus urgentes ? D'aucune, selon les analystes. « Ces augmentations prendront effet lorsque le président de la République aura décidé de valider les nouvelles grilles indiciaires des salaires et bien sûr en fonction de provisions en matière de dotation budgétaire dans la loi de finances », répond M. Belkhadem aux rares questions qui lui sont posées par la presse. A la question de savoir comment le gouvernement compte s'y prendre pour entraîner les opérateurs économiques privés à adopter l'esprit de la nouvelle grille des salaires, M. Belkhadem répond que celle-ci « aura certainement un effet d'entraînement sur les salaires dans les secteurs économiques ( ...). Il y aura un travail de préparation pour organiser une tripartite dans le cadre du pacte économique et social ». Un pacte dont de nombreux observateurs louent d'ores déjà les vertus du mort-né.