Le barrage de Aïn Zada, situé entre les wilayas de Sétif et de Bordj Bou Arréridj, alimente ces dernières en eau potable. Sur les lieux, on constate, de prime abord, l'état d'insalubrité flagrant du site. Des déchets jonchent les berges du lac, et sur ses eaux vaseuses, flottent toutes sortes d'objets. Une odeur forte agresse les narines de quiconque s'aventure sur les lieux. « Ces odeurs nauséabondes, nous les respirons quotidiennement, et elles deviennent plus fortes dès les premières chaleurs. L'eau est rouge, et c'est la même qui coule de nos robinets. L'on entend parler de beaucoup de nouvelles maladies dans la région, dont le cancer, et je suis sûr que cette eau y est pour quelque chose », nous dira un jeune agriculteur, rencontré sur place. En se promenant sur les rives du lac, on peut constater la présence de nombreux pêcheurs à la ligne, patients et passionnés, surveillant leurs cannes à pêche, plantées dans la boue, en sirotant leur café. « C'est ma passion, je pêche pour le plaisir, je passe deux après-midi par semaine à taquiner le poisson. C'est un sport passionnant, je viens surtout pour le calme qui caractérise les lieux. Personne ne vient vous déranger ici », déclare avec chaleur Omar, un pêcheur qui vient de Batna à bord de sa 404. D'autres viennent en groupe et s'adonnent chacun à son loisir. L'un d'eux, Rafik expliquera : « Nous venons tous les quatre de Sétif, chacun de nous trouve son plaisir, moi je viens pour pêcher, Ali, lui, en tant qu'artiste, vient chercher l'inspiration dans cette immensité aquatique, et les autres sont là pour nous tenir compagnie et boire leur bière ». Plus loin, des gamins, une nuée, piquent des plongeons et nagent, sans conscience aucune du danger qui les guette. « On n'a pas les moyens de partir à la mer, alors on vient barboter un peu ici, on est très prudents, on ne s'éloigne pas du bord et on évite les endroits envasés », dira avec fougue Bilal. Il y a quelques mois, des amateurs de pêche à la ligne ont signalé la présence de poissons morts sur les berges du lac du barrage ; l'on était étonné d'en découvrir un nombre important, jonchant les berges : de différentes tailles et à différents stades de décomposition, les poissons pourris participaient au décor et étaient à l'image de ces lieux en dégradation. Interrogés, les pêcheurs ont essayé de trouver des explications logiques à ce phénomène, et le premier dira à ce propos : « Certains pêcheurs au filet, lorsqu'ils prennent un grand nombre de poissons et ont peur de se faire attraper par les gendarmes, s'empressent d'en jeter le surplus », le deuxième enchaînera : « Ce sont ceux qui viennent pêcher avec leurs zodiacs qui blessent les poissons et les abandonnent, ou encore les pêcheurs, avec leurs lignes, qui se débarrassent de leur prise ». Quant à un troisième, il essayera de nous convaincre que : « c'est le cycle naturel du poisson de barrage qui, ayant atteint un certain âge et un certain poids, sort de l'eau pour mourir ». Ces « cadavres » en putréfaction sont toujours là. Quelques questions se posent d'elles mêmes : qu'en est-il de l'état de salubrité du barrage et de ses environs immédiats ? Quels produits chimiques, pouvant mettre en péril la faune aquatique du barrage, sont-ils utilisés par les agriculteurs et par les aquaculteurs ? Ce point d'eau stratégique, alimentant des centaines de ménages, a plus que jamais besoin d'un bon lifting, tant qu'il est encore temps