Depuis l'attaque menée par Ibrahim Bahanga contre un poste militaire à Tinzaouatène, opération par laquelle l'ancien cadre de l'Alliance démocratique du 23 mai pour le changement entendait marquer sa rupture d'avec le plan de paix passé avec le gouvernement ATT, la rébellion touareg dans la région du Sahel n'a eu de cesse de multiplier les assauts tant au Mali qu'au Niger. La question qui coule de source est évidemment de savoir pourquoi un tel retour à l'action militaire, et ce, au moment où les « sages » de l'ex-rébellion, Iyad Ag Ghali en tête, n'ont eu de cesse de multiplier de leur côté un appel à la raison en martelant que l'action armée ne règle rien et que le cap de la paix devrait être une option irréversible. Dans une interview récente accordée à un organe malien, Bahanga justifiait en ces termes le mobile de son soulèvement : « Nous avons repris les armes car au lendemain des accords d'Alger, l'application du document n'était pas normale. Cela s'est constaté par le renforcement du dispositif militaire dans la zone, la création des postes de sécurité et les fouilles dans les maisons. » (L'Indépendant du 30 août 2007). Il reprend : « Il y a eu des accords de paix qui n'ont jamais été respectés par les autorités. Il ne faut pas que chaque fois que des gens revendiquent leurs droits, on leur colle des étiquettes négatives. Nous sommes là pour la défense de nos droits. » Et de renchérir : « C'est un avertissement au gouvernement malien. Les problèmes que nous avons au Mali sont les mêmes que ceux que rencontrent les rebelles nigériens. Militairement, nous avons une alliance qui est là. Politiquement, ça viendra. » Et c'est venu, en effet, avec la création tout dernièrement de l'Alliance touareg Niger-Mali (ATNM). Son porte-parole (et néanmoins beau-père de Ibrahim Bahanga) Hama Ag Sidahmed, déclarait il y a quelques jours à notre journal pour expliquer ce regain d'agitation : « Depuis un an, l'accord d'Alger souffre d'un manque d'application et du détournement de ses articles prioritaires. L'Etat du Mali le réaménage sans cesse à sa guise et sans concertation avec les Touareg à l'origine des événements du 23 mai 2006. » (El Watan du 9 septembre 2007). Historiquement, la rébellion touareg au Mali a connu trois importants soulèvements : celui de 1963, celui de 1990 avec Iyad Ag Ghali, et celui de mai 2006 sous l'impulsion de Hassan Fagaga et Ibrahim Bahanga. L'ensemble de ces soulèvements se justifiait par un déni de droits au peuple touareg du Mali, notamment sous les différentes dictatures qui se sont succédées à Bamako, de Modibo Keita à Moussa Traoré. Depuis l'arrivée d'ATT au pouvoir en 1991, la politique gouvernementale à l'endroit de la population du nord a connu un net changement, faut-il le reconnaître, matérialisé par le Pacte national de 1992, un document censé prendre en charge toutes les revendications des communautés touareg de Kidal, Gao et Tombouctou. Seulement, les chefs rebelles reprochent à ce pacte sa faible mise en application, ce qui a conduit au soulèvement de 2006. La dernière vague d'attaques est donc à interpréter comme une riposte aux lenteurs relevées, selon les rebelles, dans l'application de l'accord d'Alger. Une source algérienne proche du dossier avait prévenu que si l'Algérie ne s'impliquait pas en profondeur dans ce conflit, en injectant des fonds conséquents pour la prise en charge des problèmes socio-économiques de la région, les rangs de la rébellion risquent de grossir, surtout à tenir compte d'intérêts occultes dans la région. La nouvelle désertion de Hassan Fagaga n'en est-elle pas un signe patent ?