Voilà donc la France et son ministre des Affaires étrangères, le socialiste Bernard Kouchner, qualifiés d'extrémistes par ceux-là mêmes qui en sont accusés pour avoir refusé de renoncer à l'enrichissement du combustible nucléaire, et, d'une manière générale, à son programme nucléaire. Bernard Kouchner a bien choisi son heure en lançant sa mise en garde, ou plus encore en avertissant le monde d'un risque de guerre, à la veille d'une réunion de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique) et d'une autre de représentants de certains pays devant examiner un projet de sanctions à imposer à ce pays. L'AIEA ouvrait hier sa Conférence générale de ses 144 pays membres. L'Iran et son programme nucléaire controversé devraient être au centre de la semaine de discussions de cette instance. Les six grandes puissances (France, Etats-Unis, Grande-Bretagne, Chine, Russie et Allemagne), impliquées dans les discussions sur le dossier nucléaire iranien, étudieront, vendredi prochain à Washington, un projet de résolution de l'ONU prévoyant de nouvelles sanctions, a annoncé le département d'Etat américain. M. Kouchner a estimé, dimanche, que le monde devait se « préparer au pire », c'est-à-dire à la possibilité d'une « guerre » avec l'Iran, si cette dernière persistait dans son refus à suspendre son programme nucléaire. Les Etats-Unis ont insisté le même jour sur le fait qu'ils privilégiaient toujours la voie diplomatique, par le biais de sanctions, pour faire plier Téhéran, mais sans retirer l'option militaire. La réponse iranienne ne s'est pas faite attendre même si elle est venue par le biais de l'agence de presse officielle Irna qui a accusé d'« extrémisme » le président français Nicolas Sarkozy et son chef de la diplomatie. « Le nouveau locataire de l'Elysée (le président Sarkozy, ndlr) veut aujourd'hui copier la Maison-Blanche », a écrit Irna en ajoutant que « cet Européen s'est mis dans la peau des Américains et imite leurs hurlements ». L'agence, organe officiel de la République islamique, accuse les dirigeants français d'être devenus des « traducteurs de la volonté de la Maison-Blanche », ayant adopté « un ton encore plus dur, plus enflammé et plus illogique que celui de Washington ». Alors que les Occidentaux insistent sur la nécessité d'une suspension par l'Iran de son enrichissement d'uranium, ce dernier s'est engagé auprès de l'AIEA à faire la lumière sur certains aspects de son programme. Irna a dénoncé à cet égard « l'extrémisme des dirigeants françaiLa crise du nucléaire iranien Ce serait la guerre...s qui crée des obstacles », alors que selon l'agence « le dossier nucléaire (iranien) s'approche d'un point d'équilibre grâce aux mesures prises par l'Iran et l'AIEA ». Le président français avait appelé, le 27 août, l'Iran à accepter les obligations du Conseil de sécurité de l'ONU sur son programme nucléaire, en estimant que c'était le seul moyen d'échapper à une alternative « catastrophique : la bombe iranienne ou le bombardement de l'Iran. » La France a depuis pris la tête des Européens dans les déclarations contre le programme nucléaire iranien. M. Kouchner a ainsi rappelé, dimanche, que les autorités françaises ont déconseillé aux entreprises nationales d'engager des investissements en Iran. Il a également souhaité que l'Union européenne (UE) prépare des sanctions contre Téhéran, en dehors du cadre de l'ONU. Une telle politique représenterait une rupture avec celle poursuivie par le prédécesseur de M. Sarkozy, Jacques Chirac, qui privilégiait des sanctions dans le seul cadre de l'ONU. L'agence Irna a regretté l'époque où la France « résistait face aux Etats-Unis impérialistes et critiquait leur position ». Cette « volonté d'indépendance face à la première puissance de l'Occident n'était pas limitée à une personne ou un parti, et il n'y avait pas de différence si le président était socialiste, gaulliste, communiste ou extrémiste de droite », ajoute l'agence iranienne. Très logiquement, les propos du chef de l'Etat français et de son ministre des Affaires étrangères annoncent une nouvelle guerre puisque l'Iran a fait savoir qu'il ne reculera pas. Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, a déclaré dimanche que l'Iran maîtrisait l'enrichissement d'uranium au niveau industriel et ne reculera pas face aux pressions de la communauté internationale. Tous les éléments du nouveau conflit sont ainsi réunis. Le pas sera-t-il ainsi franchi ?