En l'an 315 après la grande crue du Telfz, on raconte que derrière les montagnes du Hezzan, se trouvait une terre molle entourée d'eau de mer un peu sale, mais une terre riche, gorgée de gaz rare et d'amandes douces. Dans cette région, que les marins appelaient les îlots aux requins, régnait le sultan Abdelazuz, monarque qui dirigeait une petite communauté de fidèles craintifs. Dans cette île perdue, tout était organisé autour du calendrier royal. Le dimanche, le Sultan donnait les directives à ses vizirs, le lundi, il allait visiter les rescapés des attentats et de l'école fondamentale et le mardi, il inaugurait des tunnels. Le mercredi et le jeudi, le Sultan allait se soigner pour que le vendredi, il puisse s'adonner à son passe-temps favori, il obligeait la population à se fouetter en public tout en chantant des hymnes à la gloire de l'Elu. Tout le monde l'avait remarqué, il n'y avait pas de samedi dans le Sultanat. Mais la vie était trop chère, le travail était absent et des bandes de dauphins carnivores semaient la terreur partout. Un jour que la vie devenait vraiment trop pénible, la population manifesta. Quand le sultan Abdelazuz eut la confirmation qu'il ne s'agissait pas de communistes laïcs à la solde de l'étranger, il écrivit un décret. Désormais, il serait interdit de tuer et pour contenter tout le monde, celui qui serait pris en train de mourir serait exécuté dans les plus brefs délais. Mais le décret ne fut jamais appliqué, personne ne savait lire dans le Sultanat, et l'accès à internet était difficile, les canalisations du réseau ayant été bouchées par une femme de ménage qui avait voulu les nettoyer avec du Sanibon. La population attendit donc patiemment la mort du Sultan, ce qui arriva à l'âge honorable de 414 ans. Là, la population comprit le vrai problème du royaume. Chaque fois qu'un sultan disparaît, il faut un autre sultan.