A l'exemple de la Chine et de nombreux pays du Golfe, l'Algérie a placé une partie de son argent émanant de la rente pétrolière aux Etats-Unis sous forme de bons du Trésor. C'est du moins ce que révèle un récent rapport de Peterson Institute for International Economics sous le titre « Fonds souverain de richesse : le besoin de plus de transparence et responsabilité ». L'Algérie serait le neuvième investisseur gouvernemental étranger aux Etats-Unis selon le dernier rapport de Peterson Institute for International Economics. L'Algérie rejoint ainsi le cercle fermé des pays qui injectent leurs mannes financières dans des actifs étrangers. L'étude intitulée " fonds souverain de richesse : le besoin de plus de transparence et responsabilité " menée par M. Edwin Truman révèle que l'Algérie a placé 49 milliards de dollars aux Etats-Unis sous forme de bons du trésor (emprunts obligataires de l'Etat américain), soit la moitié de nos réserves de change. Le gouvernement algérien aurait ainsi préféré mettre son argent en " lieu sûr ". Les bons du trésor étant peu rentables (le rendement est de 5%) mais pas très risqués. Dans le classement des pays ayant placé leur argent chez l'Oncle Sam, l'Algérie se place derrière les Emirats arabes Unis, Singapour, la Norvège, le Koweït, la Russie, la Chine et le Qatar. L'Algérie qui a crée un Fonds de régulation des revenus en 2000, semble réfléchir aux générations futures. Il n'y a, apparemment, aucun mal à cela pour peu qu'il y ait une certaine transparence. Le Fonds compte déjà quelque 43 milliards de dollars. D'autres pays y ont pensé quelques années plutôt. Les plus grands fonds appartiennent aux pays pétroliers. Le fonds des Emirats arabes crée en 1976 est fort aujourd'hui de plus de 500 milliards de dollars. Le fonds koweitien crée en 1976, compte aujourd'hui 174 milliards de dollars et le fonds norvégien, crée en 1990 est évalué à 308 milliards de dollars. Les Etats-Unis qui font financer leur croissance par le reste du monde, font régulièrement appel aux pays qui ont des liquidités disponibles. L'Algérie passe ainsi de son statut d'épargnant à celui de " capitaliste actif ". Grâce à la hausse vertigineuse des cours du baril sur les marchés internationaux, notre pays dispose de réserves de changes record, estimées à près de 83 milliards de dollars, lesquelles devraient dépasser les 100 milliards d'ici la fin de l'année 2007. Inquiétudes Les "fonds souverains" appartiennent ainsi de façon directe ou indirecte au pays de Bush. De plus en plus de pays dits émergent ont recours à des instruments de ce type à l'exemple du Venezuela, la Bolivie, le Kazakhstan, le Nigeria ou l'Angola. Le rendement de ces investissements varient selon plusieurs paramètres, notamment leur durée et les montants investis. Un fait qui inquiète sérieusement les Etats-Unis et l'Europe. Ces pays craignent que les fonds souverains soient utilisés à des fins politiques. Dès l'automne, la commission européenne devrait examiner de plus près ces fonds étrangers dotés de capitaux publics. Ce sont les capitaux venus de Chine et de Russie qui attisent particulièrement les craintes. " La question est de savoir si la prise de participation d'un fonds doté de capitaux publics n'est pas liée à la volonté d'exercer une influence politique ", s'est interrogée la chancelière allemande Angela Merkel dans le quotidien économique Handelsblatt. Nouriel Roubini, professeur d'économie à la Stern School of Business de l'université de New York, a estimé que " Les sombres prédictions selon lesquelles l'émergence des fonds souverains signifie que le système financier mondial prend la forme d'un capitalisme d'Etat sont certainement exagérées. Mais il ne fait aucun doute que la gestion d'énormes actifs étrangers par un groupe réduit d'acteurs gouvernementaux, crée des complications ". Selon la banque américaine Morgan Stanley, le poids cumulé des fonds souverains devrait s'élever à 12.000 milliards de dollars à l'horizon 2015, contre quelque 2.500 milliards de dollars aujourd'hui. Ainsi, dans les années à venir, estime cette banque, les principaux investisseurs - à la fois passifs et stratégiques - des marchés financiers, seront des institutions gouvernementales. La crainte européenne et américaine ne souffre aucune équivoque : " que se passerait-il si "nos" ports, les industries de défense ou autres entreprises stratégiques étaient rachetées par la Chine, la Russie ou l'Arabie Saoudite ? ". Les fonds souverains pourraient ainsi donner lieu à un nouveau round du protectionnisme économique.