Dans les préceptes de l'Islam, le commun des musulmans n'ignore pas que Ramadhan est synonyme de piété et de miséricorde, de générosité et de pardon, d'invocations et de retour sur soi, de prières et de bonnes actions pour entrer dans les bonnes grâces du bon Dieu. A aucun moment, il n'est fait prescription que le travail est relégué au second, voire au dernier plan. A aucun moment, il n'est fait allusion que la religion recommande au jeûneur à entrer en hibernation pendant la journée. A mettre le valet sur le maillet sur son activité diurne, sous prétexte qu'il observe le jeûne. A faire preuve de flemmardise le jour, sous le motif qu'il a veillé tard. A tuer le temps dans les souks avant la rupture du jeûne. A s'emporter avant d'agresser son prochain, car sa panse est vide. A piquer des accès de colère parce qu'il se prive de rincer la dalle... Plus, là où je ne comprends que dalle, c'est qu'une mosquée devienne un véritable dortoir pendant une certaine heure de la journée. Un phénomène qui est en train de prendre de l'ampleur au sein de nos édifices cultuels. La chose n'est plus taboue, même si on ravale l'image qui n'est pas sans nous choquer, celle d'une ville où les lieux de culte invitent au seuil du parvis les fidèles à faire attention au chapardage des chaussures… D'ailleurs, c'est le seul pays dans le monde arabo-islamique où le fidèle doit avoir un œil absorbé par l'exercice spirituel et l'autre rivé sur sa paire d'escarpins. Dans le sillage, je ne sais comment qualifier le décor dans certaines mosquées d'Alger qui, après le soleil au zénith, se muent en dortoir. Dans la maison de Dieu, espace-refuge des âmes, on se plaît à piquer un somme profond, et dans quelle position ! Une image que je confonds, parfois, à s'y méprendre, à celle des victimes de 1991 éparpillées et gisant à même le sol dans la cité de Hallabja. On trouve du plaisir à s'abandonner dans les bras de Morphée, sous l'œil laxiste de la « nadhara ». On roupille. On dort comme un loir. On ronfle à pleins poumons et personne n'ose rappeler les pantouflards, les irrévérencieux que le lieu est destiné à l'adoration du Plus-Haut et au Savoir.« Chut ! Silence ! Don't disturb ! c'est le Ramadhan », me susurre mon ami Kamel.