Le monde n'a pas oublié – et n'oubliera pas – le peuple birman », assurait hier le Premier ministre britannique, sans toutefois dire comment, maintenant qu'il est avéré que le Conseil de sécurité des Nations unies n'ira pas au-delà d'un certain seuil. Le Premier ministre a réitéré son engagement à appuyer un « renforcement des sanctions de l'ONU » contre la Birmanie et à soutenir le secrétaire général de cette organisation « vers un processus de réconciliation et la démocratie » où la figure de l'opposition Aung San Suu Kyi « doit jouer un rôle-clef ». Tandis que l'ONU cherche à se faire entendre, Amnesty International et plusieurs autres organisations de défense des droits de l'homme ont appelé à manifester dans plus de 30 pays à travers la planète. Le coup d'envoi de la journée d'action a été donné en Nouvelle-Zélande où plusieurs centaines de personnes ont manifesté. Là est donc la chance des Birmans, ce peuple que l'on croyait du bout du monde à cause justement du black-out imposé par ses dirigeants. Mais la loi du silence a été brisée, et c'est ce qui a permis au monde de savoir ce qui se passe dans ce pays, contrairement au soulèvement de 1988. C'est pourquoi, la junte militaire birmane tente d'apporter des signes d'apaisement en offrant notamment de discuter avec l'opposante Aung San Suu Kyi, des gestes qui, selon des analystes, pourraient ne pas suffire à faire diminuer la pression internationale. Dernière étape du durcissement de l'attitude de la communauté internationale, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France, membres permanents occidentaux du Conseil de sécurité, ont fait circuler vendredi un projet de déclaration condamnant « la répression violente » exercée contre les manifestants par la junte birmane. Ce qui est en deçà des attentes elles-mêmes suscitées par les discours des principaux leaders occidentaux. Il est, en effet, de bon ton de choisir ses mots, et ne condamner que la répression. De ce point de vue, les Birmans ont eu plus de chance que certains peuples, mais manifestement beaucoup moins que d'autres, parce qu'il y a trop d'intérêts qui rendent les positions finales divergentes. Quant au régime militaire birman, il a compris. Lui qui n'est pas coutumier des concessions, a cependant entrouvert la porte à des discussions avec l'emblématique opposante Aung San Suu Kyi. « Le régime tente de faire diminuer la pression internationale. La junte espère y parvenir alors que les Nations unies pourraient prendre des sanctions à la suite du rapport d'Ibrahim Gambari », l'envoyé spécial de l'ONU en Birmanie, estime Wim Min, spécialiste de la question birmane, basé en Thaïlande. Selon la télévision publique birmane, le chef de la junte, le généralissime Than Shwe, pourrait s'entretenir personnellement avec Mme Suu Kyi si elle abandonnait sa politique de « confrontation » et de soutien à la politique occidentale de « sanctions ». Mais les conditions sont telles qu'il n'y a pas lieu de s'attendre à quoi que ce soit, comme le reconnaît le même analyste. L'émissaire de l'ONU, qui a rendu compte au Conseil de sécurité de l'ONU de sa mission de quatre jours en Birmanie, a assuré que l'opposante birmane, Aung San Suu Kyi, qu'il a pu rencontrer à deux reprises, espérait que les manifestations en Birmanie pousseraient la junte militaire au dialogue. Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la Paix, « est encouragée par le fait que le peuple a parlé », a dit M. Gambari. « Elle souhaite que ceci soit utilisé comme une occasion d'engager réellement un dialogue avec les autorités de manière à ce qu'ensemble ils (l'opposition et le régime, ndlr) fassent avancer le pays » dans la bonne direction, a-t-il ajouté. L'émissaire de l'ONU a, par ailleurs, affirmé qu'il y avait consensus au sein du Conseil de sécurité pour juger le statu quo en Birmanie « inacceptable ». Mais comment dépasser ce simple constat, et mettre fin au statu quo ? A partir de là, les positions se crispent, et les réponses trop générales, quand elles ne sont pas fondamentalement divergentes.