Jusqu'à hier tard dans la soirée, le leader palestinien était encore en vie, mais son état était extrêmement critique. Il ne lui restait que quelques heures à vivre, disait-on. Une phrase qui revient tout de même depuis plusieurs jours, mais le constat cette fois est partagé par ses plus proches collaborateurs, dont certains quittaient la capitale française soit pour Ramallah, en Cisjordanie, soit pour la capitale égyptienne où aura lieu une cérémonie. C'était notamment le cas de Nabil Abou Roudeina et Mohammad Rachid, son conseiller financier, qui ont quitté Paris pour Le Caire en milieu d'après-midi afin de participer à l'organisation d'une cérémonie d'hommage au dirigeant palestinien prévue « vraisemblablement » demain, si Arafat venait à mourir d'ici là, selon la délégation palestinienne à Paris. Après la cérémonie d'hommage au Caire, sa dépouille doit être transportée à Ramallah pour être inhumée dans l'enceinte de la Mouqata'a, le siège de la Présidence palestinienne et devenue le quartier général de Arafat où il était confiné depuis décembre 2001 par Ariel Sharon, son pire ennemi. L'information a été confirmée par le porte-parole de la Présidence égyptienne, Magued Abdel Fattah, qui a annoncé qu'une cérémonie « limitée et officielle » aurait lieu au Caire. Selon des membres de la délégation palestinienne à Paris, cette cérémonie doit se dérouler dans l'enceinte de l'aéroport de la capitale égyptienne. Le ministre palestinien chargé des Négociations, Saêb Erakat, a confirmé un accord avec le gouvernement israélien pour que M. Arafat puisse être inhumé à la Mouqata'a. Ce ne sont là que des préparatifs, car la direction palestinienne a fait savoir qu'elle n'annoncerait pas le décès de Yasser Arafat avant d'en avoir été officiellement informée par les autorités françaises. Et les rumeurs qui circulaient avec force mardi dernier n'avaient pas la même intensité hier, une journée marquée par la visite que le chef des tribunaux religieux en Palestine, l'imam Tayssir Al Tamimi, a rendu à Yasser Arafat. « Sa situation est très mauvaise, mais il est toujours en vie », a déclaré l'imam à l'issue de sa visite. « Je suis resté aux côtés de M. Arafat pendant près d'une heure et j'ai demandé à Dieu de soulager sa souffrance », a-t-il ajouté. L'imam Al Tamimi, venu dans la matinée de Cisjordanie, avait déclaré en arrivant à l'hôpital que « tant qu'il y a de chaleur et de vie dans son corps, on ne peut débrancher les équipements. C'est interdit par la charia (loi islamique) », avait-il précisé. Reste maintenant la question liée à l'organisation de deux cérémonies et non une seule. En fait, celle-ci est liée au statut des territoires palestiniens toujours occupés par Israël, et de nombreux dirigeants arabes ne pourront de ce fait y effectuer le déplacement afin de rendre un ultime hommage à l'un des leurs. Ce serait une reconnaissance de fait de cette occupation. Plus que cela, et à supposer que cette question puisse être occultée le temps d'un hommage, Israël aurait posé d'insurmontables conditions liées à l'entrée et à la sortie des dirigeants arabes des territoires palestiniens, Israël contrôlant les frontières. Mais les Palestiniens savent faire preuve de réalisme. Avec un enterrement à Ramallah, Arafat sera « le plus près possible d'El Qods », dont l'accès lui a été interdit par Sharon. Et le message qu'ils adressent à Sharon et à l'opinion internationale est extrêmement clair. « Cela ne peut être que temporaire. Sa destination finale sera El Qods », lancent-ils avec beaucoup de certitude. Leur combat n'est pas près de prendre fin. Ceux qui sont appelés à succéder le savent déjà.