Le moment est qualifié d'historique par les représentants du Conseil national des enseignants du supérieur (Cnes). Plus de 90% des enseignants universitaires ont répondu favorablement au mouvement de grève de trois jours lancé par le syndicat autonome. De l'Est à l'Ouest en passant par le Centre, toutes les grandes universités ont été paralysées. Cette montée au créneau des enseignants est motivée par leur rejet de la nouvelle grille des salaires qui a été « concoctée », selon le Cnes, à l'insu des véritables partenaires sociaux dans le secteur et en porte-à-faux avec les ambitions politiques officielles dévolues au secteur. Aujourd'hui, à travers cette importante mobilisation, les enseignants comptent contraindre les pouvoirs publics à honorer les engagements pris envers eux. Selon le Cnes, le recours à un mouvement de débrayage est la seule alternative pour crier haut et fort son mécontentement contre la nouvelle grille des salaires de la Fonction publique. Une grille des salaires qui n'a pas été à la hauteur des aspirations des enseignants malgré une valorisation conséquente du salaire de base mais au détriment de deux importantes indemnités (ISS et ICR) acquises et valorisées au prix d'un long combat. Le débrayage auquel a appelé le Cnes est, entre autres, un moyen, selon le syndicat, pour arracher un régime indemnitaire conséquent qui soit en mesure de réparer l'injustice commise envers les enseignants universitaires. Hier, la majorité des responsables des sections syndicales du Cnes étaient très satisfaits des résultats de la première journée de grève. « Nous sommes très satisfaits du taux de suivi. Nous sommes en droit de dire que nous avons atteint nos objectifs dès le premier jour de la grève. Nous espérons que la mobilisation sera de même pour les deux journées restantes », a souligné M. Rahmani, porte-parole du Cnes. Celui-ci fera remarquer sur une note d'optimisme que le bureau du Cnes a reçu, hier vers 14h, 28 rapports de différentes universités indiquant pour la plupart que le taux de suivi de la grève a atteint les 100%. A l'université de Bouzaréah, à Alger, 230 enseignants sur les 250 ont pris part à l'assemblée générale tenue dans la matinée au sein de l'amphithéâtre. « La participation d'un nombre aussi important d'enseignants à cette réunion est une preuve palpable de leur déception quant à la nouvelle grille des salaires et de leur consternation par rapport au traitement des pouvoirs publics de la question de l'université », a précisé le premier responsable du Cnes. En faisant le tour des universités, M. Rahmani parlera d'un raz-de-marée. Il énumérera, à cet effet, les universités qui ont réalisé un score record. A l'université de Tizi Ouzou, le taux de suivi était de 100%. Aux universités de Sidi Bel Abbès, Boumerdès, Laghouat, Médéa et Blida, les enseignants ont participé aux assemblées générales, aux sit-in et aux marches organisées à l'intérieur des campus afin de débattre de la situation ainsi que de la suite à donner à leur mouvement pour la satisfaction de leurs revendications. Tous les participants ont évoqué l'absence d'une stratégie réelle pour une prise en charge sérieuse des problèmes des enseignants universitaires. Analysant le contenu de la nouvelle grille, les enseignants partagent le même avis. Ils ont dressé un tableau des plus critiques en affirmant que celle-ci est venue tout simplement ruiner les espoirs des centaines de milliers de fonctionnaires au lieu de donner la vraie place qui sied à la Fonction publique et la possibilité de mettre fin aux souffrances sociales surtout à la lumière de l'effondrement vertigineux de pouvoir d'achat et du niveau de vie. Très déçus, les enseignants qualifient les nouvelles mesures de « simple replâtrage ». Les établissements universitaires de l'ouest du pays, notamment Saïda, Es Senia et Tlemcen, le Cnes assimile la participation massive des enseignants dans ces régions à une grande victoire. Le porte-parole du syndicat relèvera qu'à l'université de Constantine, un groupuscule d'enseignants, satisfait apparemment de la nouvelle grille des salaires, a tenté d'empêcher leurs collègues de mener à terme le mouvement de débrayage, mais en vain. Invité à donner son avis sur le nouvelle section syndicale de l'enseignement supérieur créée par l'UGTA, M. Rahmani a refusé de s'étaler sur ce point en avançant que c'est le terrain qui va faire la différence entre le Cnes autonome et le syndicat affilié à l'UGTA. « Le Cnes est un partenaire social incontournable, il a démontré à maintes reprises sa réelle représentativité sur le terrain. De ce fait, nous ne comprenons pas la position du gouvernement qui persiste à ancrer la rupture avec la société à travers des négociations verrouillées et formelles, loin de celles, responsables et transparentes, avec des partenaires sociaux actifs », a soutenu M. Rahmani. La direction du Cnes citera, pour illustrer le marasme que vit l'université, le retard accusé en matière de rentrée universitaire.