Incontestablement, il se passe quelque chose dans le cinéma algérien. Après une période de quasi-disparition, cinéastes et acteurs algériens prennent aujourd'hui tout le monde de vitesse. Une série de films parmi les meilleurs vus récemment à Carthage étaient fait et/ou joué par des réalisateurs et des acteurs algériens. Comme si après de dures épreuves quelque chose indique que le cinéma algérien est revenu en pleine forme. On a retrouvé un grand nombre de motifs de satisfaction en voyant les œuvres de Belkacem Hadjadj et Kamel Dehane. Dans El Manara et Les Suspects, on pouvait admirer à la fois l'intérêt du sujet, l'habileté de la mise en scène et le brio des acteurs. Le personnage central de La Danse du vent de Tayeb Louhichi est joué par Mohamed Chouikh. Le film a été partout particulièrement bien reçu (et primé au festival de Montréal). Pour une raison très simple : c'est que Mohamed Chouikh y dévoile un talent d'acteur magnifique et arrive à toucher le cœur des spectateurs. Le rôle de Chouikh (Youssef dans le film) est le passage d'un artiste de la vie à la mort. Il s'agit d'un cinéaste qui fait des repérages dans le désert, sa voiture s'enlise dans le sable, son portable ne marche plus, il n'a plus d'eau à boire, il lutte avec une volonté farouche pour sortir de là, construit un abri de fortune quand les pages de son scénario se répandent comme une traînée de poudre emportées par le vent de sable... Parabole captivante à prendre au pied de la lettre de l'artiste jamais au bout de ses peines, porteur d'un projet qui ne le mène nulle part et pour lequel il se bat jusqu'à son souffle final. Sans cliché ni folklore, La Danse du vent au niveau visuel est un pur enchantement. Tayeb Louhichi aime le désert et sait comment le filmer. En introduisant le personnage d'un cinéaste en passe de perdre la vie et qui montre des signes d'étranges hallucinations, le réalisateur de La Danse du vent souligne avec une grande sensibilité tout le drame que lui-même et ses collègues metteurs en scène vivent dans le parcours semé d'obstacles d'une production. Or, pour le grand public, ce processus de production d'un film demeure un grand mystère, une terre incognita, c'est justement ce que ce film (dans le film) essaye de dévoiler. En tout cas, grâce à ces films (une nouvelle génération commence à s'imposer aussi), le cinéma algérien n'est plus le grand oublié de l'histoire. Il reprend son envol international. Mohamed Chouikh, d'abord acteur (cela remonte au mythique Vent des Aurès avec la grande Keltoum), puis cinéaste de talent (La Citadelle, l'Arche du désert) et de nouveau acteur - sur lequel il faudra compter. Il participe à la dynamique du cinéma algérien y compris dans une production tunisienne.