Le secteur de l'artisanat et des métiers semble faire du sur-place à Mila. Avec 3 400 artisans inscrits au niveau de la Chambre de l'artisanat et des métiers (Cam) et une enviable onzième place au plan national, il n'arrive pas à se mettre au diapason. Les raisons de cette récession rédhibitoire sont multiples et complexes à la fois. Dans un contexte économique, certes marqué par une rude pour ne pas dire déloyale concurrence, la création et les initiatives artisanales, qu'elles soient d'art, de production de biens ou de services, restent homéopathiques et inversement proportionnelles à l'énorme potentiel des artisans professionnels en exercice. A de rares exceptions près, des centaines d'artisans, mus par le désir de se départir des charges fiscales induites par leur activité, n'hésitent pas à privilégier les circuits informels et préfèrent l'artisanat underground plutôt que d'oeuvrer dans une logique, pourtant salvatrice, de compétition loyale. Si bien que « le phénomène est en train de faire tache d'huile parmi la corporation où les cas de résiliation des inscriptions sont légion », nous a confirmé Yazid Gouah, directeur de la petite et moyenne entreprise et de l'artisanat. D'ailleurs, c'est à ce juste propos qu'en marge de la 5e édition du salon du couscous et de l'artisanat (6, 7 et 8 novembre), les organisateurs ont prévu, entre autres thématiques de sensibilisation et de vulgarisation, des filières de l'artisanat et des métiers, la programmation d'une demi-journée d'information à travers laquelle les intervenants de la Casnos et des impôts tenteront d'identifier la problématique des résiliations impromptues et immodérées des inscriptions au niveau de la Cam. « Dar Ettad » et « Aya Lilkhiat », deux petites entreprises domiciliées à Mila et ayant pour vocation la confection du cache-rideau royal et couvre-canapé, en plus de la broderie, robes, tabourets et le capitonnage de salons arabo-mauresques et de salons orientaux pâtissent, selon leurs patronnes, Dorsaf Chikirou et Bariza Beldi, de la cherté des locaux, des lourdes charges fiscales et du prix excessif du tissu et des accessoires. Salima Manouche et Razika Nadji (wilaya de Mila), activant dans le créneau du couscous, ont toutes les deux obtenu des crédits Angem, mais peinent à placer leur produit sur le marché, en dépit de la très bonne qualité et la notoriété locale de la naâma, lamhawar (couscous de qualité supérieure) et la rachta. D'après ces dernières, le gros du problème réside dans l'absence de locaux appropriés. Même son de cloche au niveau du stand des habits traditionnels de la wilaya de Tamanrasset, où Fatima Kablaoui et Mebarka Boudifa affirment « faire avec les modestes moyens du bord et n'avoir jamais bénéficié d'un quelconque crédit, en dépit du fait qu'elles soient inscrites à la Chambre de l'artisanat et des métiers ». L'entreprise »couscous Frika » de Draâ El Mizan (wilaya de Tizi Ouzou), dont le produit est répandu à travers l'ensemble du territoire national emploie, selon les exposants, 10 à 15 éléments pour le conditionnement et le tri, près de 50 femmes dans toute la chaîne de production, et réalise jusqu'à 300 q/mois de couscous avec de sérieuses perspectives d'exportation. « Nous déplorons surtout le manque de moyens roulants et financiers », souligne son gérant Amrouz. A priori, les récurrentes doléances exprimées ici et là interpellent, dans leur globalité, les pouvoirs publics sur l'urgence de repenser la stratégie nationale en matière d'artisanat par la mise en place de mesures incitatives à même de promouvoir un secteur qui bat de l'aile.