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Génération Ben Ali : le gâchis
Publié dans El Watan le 11 - 11 - 2007

Kaïs a vingt ans aujourd'hui. Le bel âge ? Pas vraiment. Il est né le 7 novembre 1987, le jour où le général Ben Ali prenait le pouvoir en Tunisie par un coup d'Etat « médical (1) » sans effusion de sang, il est vrai ; La « révolution du jasmin » commenteront certaines chancelleries occidentales, qui s'étaient empressées de cautionner ce régime et n'ont jamais pris leurs distances depuis.
Seulement, ce n'est pas dans les jasmins qu'a grandi la « génération Ben Ali », mais dans les cactus. Kaïs est né et a grandi sans avoir jamais vu un seul journal indépendant. Pour lui, il est normal que les journaux publics et privés chantent la gloire de « l'artisan du changement (2) ». Et il est normal qu'aucune critique ne soit tolérée à l'endroit du chef de l'Etat, de son entourage ou de sa politique, dans les médias. C'est comme ça. Les critiques, on a juste le droit de les chuchoter en privé, en s'assurant que les enfants n'écoutent pas ; on ne sait jamais, les murs ont des oreilles et les enfants répètent imprudemment. Kaïs ne sait pas ce qu'est l'art de la caricature qu'il a découvert sur un journal comme le Canard enchaîné, que les amis étrangers de ses parents leur rapportent de voyage de temps en temps et qu'ils lisent en cachette, car le journal est interdit en Tunisie. Kaïs ignore que le lendemain de sa naissance a marqué la mort de cet art en Tunisie. Un journaliste a osé une caricature montrant un homme sur un baudet qui sort du 6 novembre et entre au 7 novembre sur la même monture et avec les mêmes habits (allusion à la classe politique qui a servi avec la même fidélité les deux régimes, du jour au lendemain) ; ce qui lui coûta un passage de quelques jours aux sous-sols de la « Dakhilya », les locaux de la sûreté de l'Etat, avenue Habib Bourguiba, où on vous somme de mettre votre dignité aux vestiaires. La leçon est valable pour tous, depuis ce jour là, plus aucun caricaturiste ne s'essaya à cet art impertinent ; certains se sont convertis en cireurs de pompes. L'un des plus virulents crayons a signé un hymne à la gloire de Ben Ali en bande dessinée, les plus dignes se sont exilés. Pour Kaïs, c'est normal d'avoir le même président pour toujours. Il a grandi avec le même président qui n'a jamais changé et il va peut-être mourir avant lui. Les présidents chez nous, ça ne change pas ! Périodiquement, on organise un festival et on proclame que l'on est content de l'avoir et que sans lui, on ne peut rien faire. On appelle cela « élections », mais c'est réservé aux adultes qui ont un boulot et beaucoup de dettes avec les banques. Les jeunes n'ont pas de carte d'électeur, c'est normal, ils ne payent pas le 2626 (3) ! Kaïs aimait bien passer ses week-ends dans les cafés de karaoké avec des copains du quartier huppé d'El Manar. Le goût lui est passé depuis que l'un de ses amis a été embarqué par les flics, qui l'ont attrapé fumant un joint et il a écopé de 2 ans de prison, le tarif de base. Pour Kaïs, c'est normal que les flics fassent des rafles dans les cafés, embarquent les jeunes au poste un samedi soir et prennent 24 h pour vérifier leur identité à coups de matraques. Il en a toujours été ainsi. Kaïs n'a pas connu cette période où les policiers du régime autoritaire de Bourguiba présentaient des mandats d'amener avant d'embarquer un citoyen. La fréquentation des cybercafés n'en est pas moins à haut risque, Kaïs le sait maintenant et à ses dépends. Il a rencontré un jeune, avec lequel il a sympathisé, qui lui a fait découvrir certains sites islamistes salafistes, ceux-là ne sont pas censurés par la cyberpolice ! Il a découvert un autre discours et un exutoire à sa quête d'idéal et de défis à relever. Un jour la police est arrivée dans le cybercafé et a embarqué son copain dans une mise en scène digne d'un western spaghetti. Les autres ont compris. De crainte de voir son tour arriver, tétanisé, il s'est cloîtré chez lui. Ils ne sont pas venus le chercher, ni le 1ier, ni le 2e jour, ni les jours suivants ; pourtant, le gérant du cybercafé le connaît pour avoir relevé son identité et son adresse et tout le monde sait que les propriétaires des cybercafés travaillent avec la police. Kaïs ne sait plus quoi faire de ses vingt ans. Il a envie d'éclater, de se faire exploser pour la bonne cause et il y en a tellement ! Ce vide, il ne le supporte plus. Il a le « dégoutage » comme on dit dans le jargon des jeunes Tunisiens. Cela fait déjà un moment qu'il ne suit plus les cours à l'université. A quoi bon ? Il n'a même pas pu choisir sa branche d'études, il voulait faire les Beaux-arts et on lui a imposé la filière « techniques commerciales » dans un institut créé partout, comme des champignons et qui n'ouvrent sur aucun avenir. Les diplômes ne sont pas assez qualifiés pour les métiers de cadres et trop qualifiés pour les filières professionnelles. Kaïs comprend que ces champignons ont l'avantage de retenir les jeunes et de fournir des statistiques aux « réalisations de Ben Ali ». Kaïs ne rêve que d'une chose maintenant, partir, fuir n'importe où. Il a fait une demande de passeport et on la lui a refusée : « Il n'a aucune raison valable pour voyager » ! Kaïs ne le sait que trop, quand on est jeune, on est considéré comme un suspect, suspect de « délit de jeunesse », cette race qui n'a rien à perdre et qui fait tant peur à Ben Ali. Aujourd'hui, Kaïs pense à brûler à faire le « Harg », franchir les frontières de n'importe quelle manière, quitte à mourir en mer et mourir pour mourir, autant que cela soit pour « la bonne cause » !
Notes de renvoi
1) Ben Ali a fait signer à des médecins au ministère de l'Intérieur, le 6 novembre 1987, un certificat de sénilité concernant le premier président de Tunisie, Habib Bourguiba et a pu ainsi le déposer et prendre possession de Carthage.
2) La qualité attribuée à Ben Ali.
3) Fonds de solidarité opaque, prélevé comme un impôt obligatoire chez les salariés.


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