Yasmina Khadra, de son vrai nom Mohamed Moulesshoul, est le nouveau directeur du Centre culturel algérien à Paris. Installé mardi après-midi par l'ambassadeur Missoum Sbih, l'écrivain sera-t-il le gestionnaire et l'animateur attendu d'une institution moribonde, réduite à sa plus simple expression. Paris : De notre bureau Réussira-t-il à en faire le lieu de diffusion et de rayonnement de la culture algérienne, de ses expressions les plus diverses ? Parviendra-t-il à faire remplir au CCA « l'importante mission de contribution à une meilleure connaissance de la culture algérienne ? », comme l'a rappelé l'ambassadeur Missoum Sbih, et en faire une vitrine culturelle de l'Algérie en France digne de ce nom ? « Ce ne sera pas une mince affaire », l'un et l'autre en conviennent, tant les tâches de remise à flot de structures en état de léthargie sont nombreuses et les attentes de prestations de qualité impérieuses. Le CCA était sans directeur depuis la nomination, il y a deux ans, de Taleb Bendiab à la tête de l'Institut du monde arabe. « Je ne m'attendais pas à cette nomination, le président a une grande ambition pour ce centre, il m'a confié la tâche de lifter l'image de la culture algérienne, torpillée, et permettre à des hommes de talent de rayonner », a indiqué Mohamed Moulesshoul. Beaucoup d'entre eux « ont été déçus », « ont perdu confiance ». « Cela va être difficile. » « Parce que j'ai été isolé, je sais que des écrivains vivent cet ostracisme. Ce centre leur appartient », a ajouté le nouveau directeur, puis il relève les « clichés » et « préjugés » qui entourent les hommes et femmes de culture algériens. « A chaque fois qu'une tête algérienne émerge, il faut qu'elle appartienne au diable et à ses suppôts, on peut échapper à cette approche scélérate. » « Je suis la preuve que le talent algérien peut s'imposer. » Ne va-t-on pas perdre l'écrivain ? « Mes cinq plus grands livres, je les ai écrits quand j'étais engagé dans la lutte antiterroriste. Si me consacrer à d'autres auteurs est plus important qu'écrire je le ferai. » Et pourquoi pas, concilier les deux. Yasmina Khadra ajoute que son roman en cours a pour trame la réconciliation entre Français et Algériens. A-t-il eu carte blanche pour accomplir sa mission de directeur du CCA ? A-t-il reçu une feuille de route ? lui a-t-il été demandé. « La carte blanche, pour moi, ce sont les moyens. » « Je n'ai pas de feuille de route. C'est la première fois depuis l'indépendance de l'Algérie qu'un président de la République confie une responsabilité à un écrivain qui n'est pas du sérail. » Ce qu'il compte faire en tout premier lieu ? « Je veux d'abord voir comment ce centre fonctionne, voir où sont ses points forts, ses points faibles, comment le renforcer sur le plan humain et matériel. » L'intervention de l'ambassade se limitera à aider le directeur à mettre en place les structures institutionnelles du centre et à son fonctionnement dans de bonnes conditions, a précisé l'ambassadeur Missoum Sbih et il a ajouté qu'un conseil d'orientation qu'il préside a pour mission de tracer les grandes orientations du centre. L'ambassadeur a aussi indiqué avoir envisagé avec certains consuls qui disposent de locaux d'installer des antennes du CCA afin de prolonger les activités de celui-ci, partant du constat que les visites qu'il a effectuées dans les 18 représentations consulaires algériennes dans l'Hexagone ont montré combien « la communauté algérienne se sent frustrée de ne pas pouvoir participer au rayonnement culturel national ». « Il faut éviter que les effets bénéfiques de l'année de l'Algérie en France ne se perdent. » Le CCA n'a pas pour ambition de s'adresser uniquement aux ressortissants algériens, il doit viser également un public français, voire diversifié.