Tout Alger avait les pieds dans l'eau. De Zéralda, où des quartiers entiers ont été submergés par les flots, à Birkhadem où une cité de plus de 300 habitants a été coupée du reste du monde, tout ou presque a été inondé par les eaux en furie. Cette fois encore, les habitants du vieux quartier de Bab El Oued ont cru assister à un remake de la catastrophe de novembre 2001. La catastrophe qui avait fait plus de 700 morts était dans tous les esprits. Trois véhicules en stationnement à Rabah Bissas se sont renversés sans faire de victimes, et les rues sont devenues « navigables ». Le centre-ville n'a pas connu cette fois-ci le phénomène des crues bien que l'alerte ait été chaude dans certains endroits. Ceux qui en ont souffert le plus, ce sont les commerçants car ils étaient obligés de fermer leurs boutiques. Des élèves ont été renvoyés illico presto chez eux alors que d'autres furent retenus dans leurs classes. L'urbanisation poussée de l'oued M'kessel a été évoquée par les résidants qui ne manqueront pas de pointer du doigt l'administration qui était « plus qu'indulgente » avec des personnes indélicates. « Des débrouillards comme on n'en trouve pas ailleurs, ont su graisser la patte à des élus qui évoquent toujours le manque de moyens. Mais pour s'offrir une 406... », se désole Samir qui affirme que des baraquements ont été construits sur le lit de l'oued, lequel a charrié pendant la journée de dimanche des tonnes de gravats. Les pratiques ont repris de plus belle après la catastrophe de 2001. « Des gens indélicats, venus pour beaucoup des autres localités, construisent sur le lit de l'oued, surtout durant l'été, sans que la wilaya déléguée de Bab El Oued intervienne. » « Les responsables locaux n'y peuvent rien. Les gens de la localité, trouvant le filon, se sont mis à monnayer ces espaces de quelques mètres carrés, à plus de 30 millions de centimes. Des parcelles, il en reste toujours. » Les notes émises par les autorités locales sont restées caduques puisque même les vendeurs des matériaux de construction activent aux abords de l'oued sans que les autorités puissent y mettre le holà. « La pluie a charrié tout ce qu'elle a trouvé sur son passage : briques, sable entreposé dehors », insiste Samir qui dit que Beau Fraisier est l'un des endroits les plus touchés par les inondations. Les travaux entrepris n'ont pu servir à grand-chose, le suivi ayant fait défaut. « Les autorités font du tape-à-l'œil et les agents de la voirie n'entretiennent pas les avaloirs à temps. Faut-il attendre les grandes pluies pour faire les curages nécessaires ? La réponse est sans doute non, mais qui s'en soucie », déclare Hocine, un autre « enfant des crues » en ajoutant que les moyens font défaut aux jeunes engagés dans le cadre de l'opération, « pompeuse » Blanche Algérie. Autre grief retenu contre les autorités, les travaux de réhabilitation des grands ensembles, entrepris à la hâte. « Au lieudit la Carrière, un oued a fait son apparition. Les gravats ont été entreposés par les entrepreneurs après les travaux de réaménagement menés dans les logements de Diar El Kaf. Ces gravats ont été charriés par les eaux. Les autorités, ou ce qu'il en reste, n'en ont cure », lance Samir qui évoque une situation de « non-Etat ». Des travaux ont été menés par la direction de l'hydraulique. Bessac, l'entreprise française qui s'est chargée de la réalisation d'un ouvrage – en aval du collecteur de Oued M'kessel – de rejet en mer au niveau du stade Ferhani, semble trouver énormément de difficultés, à en croire des riverains. Mais, pour eux, avec les travaux menés par cette entreprise, les choses connaîtront une autre tournure.