La présentation hier par la ministre déléguée auprès du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique chargée de la Recherche scientifique, Mme Souad Bendjaballah, du projet de loi modifiant et complétant la loi n°99-05 du 4 avril 1999, modifiée, portant loi d'orientation sur l'enseignement supérieur, a fait l'objet de critiques acerbes de la part des élus de la chambre basse. Les députés ont rejeté en bloc ce projet, notamment les articles se rapportant au système LMD (licence-master-doctorat) et l'ouverture de l'université au privé. Certains intervenants ont même affiché leurs « craintes quant à l'avenir de l'université algérienne » et se sont interrogés sur les raisons de l'ouverture de ce secteur au privé, faisant part au représentant du gouvernement de leur mécontentement du système LMD qu'ils qualifient d'échec, vu le nombre d'étudiants qui n'ont pas réussi leur cursus. Abordant comme première étape le contenu du projet, dans son intervention, Mme Bendjaballah a expliqué que la loi permet au secteur privé d'ouvrir des établissements pour une formation supérieure dans toutes les spécialités, à l'exception des sciences médicales. Le dispositif proposé, selon la représentante du gouvernement, a pour objet d'encadrer de manière plus étroite la création d'établissements privés de formation supérieure ainsi que leur fonctionnement. Dans sa longue plaidoirie, Mme Bendjaballah a expliqué que la création d'établissements privés est subordonnée à une autorisation du ministre chargé de l'Enseignement supérieur. Cette autorisation est assujettie à la réponse aux conditions fixées par la loi et précisées dans un cahier des charges. Elle est délivrée au vu du respect de certaines conditions, notamment la disponibilité des infrastructures et équipements nécessaires au bon déroulement de la formation supérieure envisagée et la disponibilité d'un personnel pédagogique de la formation supérieure envisagée dont le niveau des enseignements doit être au moins égal à celui assuré dans les établissements publics de formation supérieure. Des droits et des devoirs Le texte de loi oblige cependant ces établissements à appliquer les programmes d'enseignement et les conditions de progression dans le cursus fixés par le ministre de l'Enseignement supérieur lorsque la spécialité assurée est dispensée dans des établissements publics de formation supérieure. Par ailleurs, le projet souligne que la création des établissements privés étrangers de formation supérieure est subordonnée à un accord bilatéral ratifié. Le texte prévoit un certain nombre de sanctions pénales applicables à tout contrevenant aux règles fixées par les pouvoirs publics en la matière. Toutes ces dispositions ont essentiellement pour but, d'après la ministre déléguée, de combler un vide juridique au bon contrôle de la participation d'opérateurs privés à la mission de formation supérieure afin de préserver au mieux les droits des citoyens usagers. Lors des débats, Louisa Hanoune, la présidente du Parti des travailleurs, a vivement critiqué les amendements apportés dans ce projet de loi. Chiffres à l'appui, elle révélera qu'il y a un million d'étudiants en Algérie et 37 universités, et pour cette rentrée universitaire, seuls 30% des étudiants se sont inscrits dans le système LMD. Un système qui reste, selon Mme Hanoune, une grande aventure. « Pourquoi imposer aux étudiants un système qui a montré ses limites en Europe », s'est interrogé la représentante du PT qui estime qu'il n'est pas démocratique de présenter un tel projet à l'Assemblée dès lors qu'il a été rejeté par les députés trois jours avant la clôture de la session précédente et qu'aucun changement n'a été opéré dans le contenu ! Le PT, à travers Mme Hanoune, exige le retrait du projet et l'ouverture d'un débat sur le secteur estimant que l'ouverture de l'enseignement supérieur au privé est une privatisation de l'université, et s'est interrogé sur l'intérêt d'ouvrir un débat sur le système LMD trois ans après son application. Abondant dans le même sens, un élu du FNA a indiqué que ce projet serait une raison pour l'Etat d'abandonner le financement de l'enseignement. « Aucune partie n'a été associée à l'élaboration de ce projet. L'Etat a fait dans la précipitation. A notre avis, il fallait d'abord procéder à l'évaluation du système actuel avant d'opérer un changement auquel aucun des concernés n'a été préparé », a expliqué l'intervenant. De son côté, M. Djalatou du MSP a exhorté les pouvoirs publics à renforcer d'abord l'université publique avant d'ouvrir le champ au privé. M. Djalatou s'est interrogé plus loin sur le statut particulier de l'enseignant qui tarde à voir le jour et aussi sur l'absence d'une structure indépendante s'occupant de la classification des universités. M. Kara Ali du FLN a carrément affiché ses craintes quant à un risque de fermeture de l'université algérienne. « Certes, on ne doit pas ignorer les progrès que les universités européennes ont atteint, mais nous affichons nos inquiétudes concernant le système LMD, car il a été appliqué sans aucun préavis », a soutenu M. Kara Ali.