Vous êtes à l'initiative d'une alerte concernant le chott de Aïn El Beïda. Quelles sont donc les menaces que vous avez identifiées sur le chott ? Avant d'entamer le volet de l'alerte, je tiens à informer les lecteurs que le chott de Aïn El Beïda est un écosystème semi-naturel, c'est-à-dire qu'une partie de ses ressources en eau provient d'une source naturelle ; autrement dit que la remontée de la nappe phréatique en période hivernale alimente ce site ; l'autre part des eaux est issue des eaux de drainage des palmeraies voisines. Ce chott est le point le plus bas de Ouargla ; son altitude varie entre 127 et 131 m. Nos ancêtres ont toujours laissé ce site à son effet tampon, synonyme d'équilibre entre les apports en eau pour le chott et les pertes par voie d'évaporation et d'infiltration. Beaucoup d'imprécisions sont avancées sur la situation de la remontée des eaux à Ouargla en rendant ce problème aux eaux qui s'accumulent à Aïn El Beïda ; eh bien, c'est faux ; ce problème revient en premier lieu à la défaillance dans les constructions des réseaux d'eaux usées et à l'abandon des opérations de curage des drains principaux et secondaires qui quadrillent la ville et les palmeraies limitrophes. Je reviens maintenant sur l'alerte lancée quant au futur de ce site d'importance internationale (site Ramsar) et je déclare qu'une grande menace pèse sur ce site et si les pouvoirs publics n'interviennent pas à temps, nous risquons un jour de ne voir ce point que sur la carte. Les travaux d'assainissement, tels qu'ils sont en cours, mènent à un assèchement du chott, puisqu'on va toucher à la principale source en eau du chott, en l'occurrence les eaux de drainage. Quelles pourraient être les conséquences sur la faune et la flore ? Ce chott accueille chaque année des milliers d'oiseaux migrateurs et d'autres sédentaires ; il y en a même des nicheurs, et les travaux de recherche menés par notre équipe en sont témoins. Je rappelle là que les travaux sont toujours en cours dans un but de caractériser les potentialités de cet écosystème et d'en préciser les impacts sur l'environnement. Si les travaux d'assèchement continuent, nous risquons de voir une catastrophe écologique qui se traduira par des manifestations négatives, telles que la disparition d'espèces végétales existantes, la fuite et l'abandon d'autres espèces. Déjà, les premières constations négatives sont présentes, se traduisant par une régression accrue des effectifs de quelques espèces aviennes, exemple fait des effectifs de flamants roses, n'atteignant pas les 1000 individus (à rappeler que durant la même période, en 2006, nous comptons 6000 individus de cette espèce) ; pour ce qui est des espèces végétales, le dessèchement partiel ou total de plages de verdure qui ornaient le chott autrefois. Avez-vous pris attache avec les autorités locales ? Les autorités locales ont toujours été avisées de la situation dans le chott, que ce soit par le biais de correspondances écrites ou par des appels au secours. L'optimisme est toujours présent mais à des degrés moindres. Mais la réalité, c'est qu'il n'y a pas de geste de bonne volonté de leur part. Je lance à travers cette interview un appel aux autorités locales pour qu'elles associent dans leurs décisions les scientifiques et les gens du domaine pour que nous n'arrivions pas un jour à une situation irréversible portant atteinte aux générations futures et à leurs préoccupations. Quelles solutions préconisez-vous ? Il y a pas mal de solutions qui peuvent remédier à cette situation dont les réinjections des eaux usées, après épuration, dans le chott ; la seconde solution c'est de laisser le chott en état tampon, c'est-à-dire laisser les eaux de drainage au niveau du site et ne pas les charrier vers d'autres lieux. Avez-vous un message et où peut-on vous joindre ? Je rappelle aux lecteurs d'El Watan que je ne suis pas partisan et je n'appartiens à aucune association, mais je suis un scientifique et un enseignant voulant apporter du mieux à notre environnement et à notre pays, que j'espère propre et écologique. Pour ce qui est des coordonnées, je suis membre d'un forum sur le net dont l'adresse est : « [email protected] ».