En moins d'un mois, trois cétacés ont échoué près de Skikda et de Beni Ksila. Une scientifique algérienne a lancé au début de l'été une campagne de sensibilisation aux échouages, nombreux sur nos côtes, afin de créer un réseau de collecte de données. Sur la trentaine d'espèces de cétacés recensées en Méditerranée, au moins huit fréquentent les eaux algériennes. Certains, comme le dauphin commun, sont déjà visibles à 2 kilomètres de nos côtes, alors que d'autres, comme le rorqual, ne se croisent qu'au large. Sur la trentaine d'espèces de cétacés recensées en Méditerranée, au moins huit fréquentent les eaux algériennes. Des merveilles de la nature protégées par la Convention de Barcelone de 1976, amendée en 1995 et par un Accord pour la conservation des cétacés de la mer Noire, mer Méditerranée et zone atlantique contiguë (Accobams), que l'Algérie a ratifié cet été. Leur durée de vie, très longue, et leur taux de reproduction, très bas, rendent les cétacés particulièrement vulnérables aux menaces induites par l'homme, surtout en Méditerranée, en raison de la géographie fermée du bassin, de la densité humaine et de l'intensité des activités. Les filets Que ce soit les filets dérivants — en théorie interdits — ou les filets usés jetés au fond de la mer, ils représentent une des menaces les plus importantes pour les cétacés. « Très peu d'études ont été faites sur ce phénomène mais on sait qu'il est important », souligne Assia Henda, scientifique spécialiste en cétologie. Ils peuvent mourir accidentellement en s'étranglant dans les mailles ou en se noyant faute de pouvoir s'en débarrasser, ou, parfois, être tués par les pêcheurs furieux de les voir endommager leur matériel. « Cela dit, avec les campagnes de sensibilisation, nuance-t-elle, on sait aussi que certains pêcheurs, sachant les cétacés protégés, les relâchent, au risque même de perdre leur pêche. » La navigation Avec une moyenne annuelle de 140 000 trajets pour plus de 10 000 navires, l'intense navigation commerciale en Méditerranée occidentale affecte directement les populations de cétacés qui y vivent, s'y alimentent et s'y reproduisent. L'association scientifique Souffleurs d'écume précise que deux espèces sont surtout concernées : le rorqual commun et le cachalot. Entre 1986 et 1998, 26% des mortalités de rorquals communs ont été attribuées à une collision avec un navire. Puisque cette population est de petite taille et qu'elle ne se reproduit pas avec les autres populations de l'Atlantique, génétiquement différentes, ce taux de collision est préoccupant. De récentes avancées ont permis de déterminer qu'au moins 1,3 rorqual est tué chaque année en Méditerranée nord-occidentale à la suite d'une collision. Mais toute la communauté scientifique s'accorde sur le fait que ce chiffre est très largement sous-estimé (d'un facteur 20 à 30 selon certains auteurs) puisqu'il ne prend en compte que les collisions connues. Si le nombre de baleines réellement tuées reste à préciser, un taux de mortalité situé entre 16 et 19% des animaux percutés. La pollution La Méditerranée, de par son étroite communication avec l'océan et en raison de la proximité des zones industrielles, détient à elle seule 65% des ressources mondiales de mercure. « Métaux lourds (cadmium, plomb, mercure), mais aussi pesticides comme le DDT, hydrocarbures… Ces substances se concentrent dans les graisses et dans le foie des cétacés en provoquant des lésions sérieuses, souligne Assia Henda. Une des causes de décès des dauphins échoués sur nos côtes est probablement liée aux taux élevés de polluants divers trouvés dans les prélèvements. » Et quand les substances chimiques ne sont pas absorbées, elles sont respirées, causant des troubles respiratoires majeurs. De manière générale, toutes les espèces fréquentant les zones côtières — dauphin commun, stenelle, grand dauphin — sont davantage exposées. Certaines organisations de protection de la nature considèrent que la pollution des eaux est un facteur de destruction bien plus important pour l'écosystème marin que la pêche industrielle à outrance.