Saïd Smaïl, écrivain prolifique, vient de publier deux ouvrages. Un roman, L'île du diable, chez Barzakh et Délit de survie, chez Casbah Editions. Ce dernier de 166 pages n'est ni un essai politique ni une autobiographie. C'est plutôt un regard critique d'un journaliste qui témoigne de son vécu pendant les années 1990 sur ses déboires avec la direction du journal qui l'employait depuis 1972, El Moudjahid, alors que les journalistes tombaient quasi quotidiennement sous les balles des terroristes. C'était pendant son exil en France (1994-1996), fuyant la menace terroriste que le directeur d'El Moudjahid (qui avait remplacé Mohamed Abderahmani, assassiné le 27 mars 1995) le licencie pour « abandon de poste ». Pour Saïd Smaïl, la survie pour les « hommes promus par les hasards d'alliances bâties sur des crapuleries mafieuses, viennent à dicter au peuple du labeur les vertus nourricières » (p 83) était un grave délit. Délit de survie est incontestablement une mise au point à ceux qui ont « comploté » contre Saïd Smaïl, mais aussi un espace rédactionnel qu'il n'a pu avoir dans El Moudjahid pour relever les tares des démocrates, le féminisme « exhibitionniste », l'injustice de la justice, la presse indépendante, le multipartisme, l'arabisation, Aït Ahmed (président du FFS), les archs « qui déterminent toujours le sens du vent, alors qu'ils sont la philosophie même du conservatisme dans ce qu'il a de plus rigide et trop souvent rétrograde (…) » (p 142) . A 70 ans, Saïd Smaïl est toutefois resté figé, formel et sentencieux dans certaines de ses assertions comme la Kabylie « se veut d'ailleurs telle qu'elle est, et le proclame : berbère, arabe et musulmane » (p 107). L'on ne se rappelle pas quand cette région a proclamé son arabité ! Certains détails du déroulé de la scène politique nationale ont échappé à l'auteur telle « la Conférence de l'entente nationale (première version) ». L'ouvrage, qui est aussi une importante fixation par l'écrit d'un pan dramatique de l'histoire contemporaine du pays, aurait dû s'attarder sur certains épisodes de l'Algérie des années 1990. Car, le grand mérite de Saïd Smaïl est de mettre sur les étals un ouvrage qui retrace une période dramatique de la vie politique de l'Algérie. Dans Délit de survie, c'est l'Algérie meurtrie, les espoirs trahis, mais aussi un peuple qui se bat pour vivre, simplement, que l'on retrouve. Témoin privilégié d'événements de la scène nationale et un tantinet provocateur, l'ouvrage de Saïd Smaïl ne laisse pas indifférent. A lire. Saïd Smaïl. Délit de survie. Casbah Editions. Alger. 2007. 340 DA.