On s'interroge de plus en plus sur les raisons pour lesquelles les « dix milliards de dollars qui dorment dans les banques », selon les propos du ministre des Finances, Abdelatif Benachenhou, ne sont pas mobilisés pour le financement de l'investissement. La question est d'autant plus lancinante au moment où les institutions internationales s'accordent à dire que jamais l'Algérie ne s'est retrouvée dans une situation financière aussi propice à l'investissement. Contacté par téléphone, le secrétaire général de l'Association des banques et des établissements financiers (ABEF), Abderahmane Benkhalfa, reconnaît d'emblée que « la possibilité de financement des banques est meilleure ». Il considère néanmoins que « le temps durant lequel les ressources sont disponibles est court. La maturité des ressources est souvent à court terme, donc elles ne peuvent être mises sur des financements à long terme ». Autrement dit, « il y a beaucoup d'argent qui entre dans les banques, mais il y a aussi beaucoup d'argent qui en sort », selon les explications du secrétaire général de l'ABEF. « Il y aura un risque de créer un problème d'insolvabilité », a-t-il souligné. Et d'ajouter plus explicite : « Il y va de la sécurité des dépôts qu'il faut préserver. » D'après lui, il y a deux éléments dont il faut tenir compte : la durée des ressources et du financement et la qualité du financement ou des projets à financer. « Les banques peuvent faire plus de crédits, mais cela ne veut pas dire que la totalité des liquidités est en mesure d'être investie », a-t-il affirmé à ce propos. Pour étayer ses dires, citant l'exemple d'une banque qu'il ne veut pas nommer, il affirmera que celle-ci a été liquidée en raison de ses déboires du fait que « le risque de transformation a été trop long ». Il rappellera qu'il n'y aura plus d'assainissement des portefeuilles. Les banques sont, de ce fait, tenues à plus de rigueur. « Elles sont donc responsables de la qualité des crédits », fera-t-il savoir. M. Benkhalfa signalera également que les banques ne sont pas tout à fait prêtes pour répondre aux besoins de financement de l'investissement qui s'accroissent de plus en plus et l'augmentation de la demande pour les crédits immobilier et automobile. « Elles doivent d'abord s'adapter à ce marché où la demande est de plus en plus importante », a-t-il expliqué. Pour ce faire, « les banques sont en train de rénover toute la fonction crédit. Environ 1200 agences sur le territoire national sont concernées », a-t-il indiqué. Aussi, plusieurs mesures ont été décidées dans ce sens. Il en est ainsi de la mise en place d'un système informatique performant. Mais le plus important reste le renforcement du suivi des engagements et du système d'évaluation des risques. La diversification de la clientèle a, elle aussi, contribué à pousser les établissements financiers à revoir leur copie. « Ce n'est plus les grandes entreprises seulement qui sont bénéficiaires de crédits, mais il y a de plus en plus de petites et moyennes entreprises, de ménages et de particuliers qui se présentent aux banques pour bénéficier de crédits », fera remarquer M. Benkhalfa. Mais encore faut-il que les projets soient rentables, car, de l'avis de notre interlocuteur, « si les banques accordent des crédits qui se régénèrent et qui deviennent des créances non performantes, ce sont leurs bénéfices qui en pâtiront. Il faut redistribuer les ressources avec le moindre coût et avec plus de rentabilité ». La balle n'est pas uniquement dans le camp des banques qui, après la phase de récapitalisation et d'assainissement, sont entrées dans une phase de développement du financement et de la maîtrise du risque, a-t-il souligné. « Il faut aussi moderniser les entreprises. Elles doivent développer les instruments managériaux et la gestion financière », a-t-il ajouté. Pour ce qui est des ménages et des particuliers, M. Benkhalfa a confirmé la mise en place de la centrale des risques des particuliers et des ménages durant le premier semestre 2005. Cette structure sera un instrument de contrôle, précisera-t-il. « Quand des particuliers et des ménages bénéficient d'un crédit, il sera enregistré au niveau de la centrale. Et en cas d'une autre demande de crédit, elle en informera les banques concernées afin de prendre les mesures qui s'imposent et éviter une situation de surendettement. Les crédits ne doivent pas dépasser 40% de leurs revenus », dira en substance M. Benkhalfa.