Fin de délai aujourd'hui pour le dépôt des candidatures pour briguer les sièges du Conseil de l'Ordre des avocats d'Alger. Sept listes électorales se disputeront les 31 sièges du conseil, dont l'élection est prévue le 24 janvier. Le 14 janvier, la commission électorale étudiera les dossiers pour validation. Dans cette bataille, la liste des candidats du bureau sortant, dirigé par le bâtonnier national, Me Abdelmadjid Sellini, reste la plus sévèrement critiquée. Les autres candidats sont unanimes à réclamer une « transparence et une équité » dans l'organisation de l'opération électorale, en exigeant une représentation au sein de la commission de préparation du vote, composée des membres du bureau sortant, dont plusieurs sont candidats. Lors de la dernière assemblée générale du conseil, les débats autour de cette question ont été malheureusement vite élagués. Mais les candidats ont décidé de déposer aujourd'hui une demande écrite au bureau du conseil. Ainsi, la précampagne se caractérise par des tirs croisés visant essentiellement les membres du bureau sortants. Les griefs sont lourds et multiples. « Pendant les deux mandats rien n'a été fait, si ce n'est une grève générale pour réclamer plus d'espace au niveau de la nouvelle cour d'Alger. Nous aurions aimé voir ce bureau s'occuper de la loi portant profession des avocats, qui n'a pas vu de changement depuis plus de 20 ans. Nous voulons que les mandats soient limités pour que les élus puissent militer pour l'organisation et non pas pour garder leur poste. Nous voulons redonner de la crédibilité au corps des avocats », déclare Me Mustapha Bouchachi, tête de liste d'un groupe d'avocats. Les mêmes propos sont tenus par Me Abderrezak Chaoui, à la tête d'une liste dite indépendante. Pour lui, « il est important d'opérer un changement au sein de l'organisation ». La « nécessité » du changement est sur la bouche des autres candidats, comme Mes Benbelkacem, Cherif Chorfi et leurs confrères indépendants. Me Sellini, bâtonnier sortant, défend sa liste en se basant sur le bilan de ses deux mandats. « C'est la première fois dans l'histoire du bâtonnat que les caisses de l'organisation sont pleines, 70 millions de dinars, qu'une assurance vie soit arrachée pour les avocats et que des biens immobiliers soient achetés au profit de l'organisation », dit-il lors de la dernière assemblée générale. Il estime que les critiques dont il fait l'objet sont « légitimes », car elles entrent « dans le cadre de la campagne électorale ». Une réaction qui fait sortir ses adversaires de leurs gonds. « Cette somme représente la collecte de la cotisation de 50 000 DA, versée par chacun des 1451 nouveaux avocats ayant rejoint les rangs. Leur arrivée à la veille des élections est frappée de suspicion. Nous n'avons malheureusement pas les moyens de faire une contre-expertise de la gestion financière, alors que nous savons que des dépenses inutiles ont été effectuées », déclare Me Bouchachi. Son confrère, Me Chaoui, abonde dans le même sens en s'interrogeant sur « les raisons qui ont fait que l'actuel bureau a signé 520 dérogations pour des avocats non domiciliés à Alger à la fin du mandat. De plus, à ce jour, nous n'avons pas encore eu la liste des avocats qui sont appelés à voter, alors qu'elle doit être remise au greffe et diffusée au niveau du barreau ». Fait inquiétant aussi est cette sous-représentation des femmes, dans une corporation qui s'est largement féminisée ces dernières années, puisque la gent féminine constitue plus de 60% de l'effectif. Aucune femme tête de liste, et le nombre de candidates par liste (de 31 sièges) ne dépasse pas 5. Le bureau sortant compte 3 femmes seulement, dont Me Ould Hocine Chelli Nora. Le vécu de celle-ci montre à quel point le corps des avocats reste « réfractaire » à la représentativité féminine. Elle a choisi de se représenter pour la seconde fois, sur la liste de Me Bouchachi, « d'abord pour renforcer le principe d'indépendance de la justice, mais aussi pour réparer une injustice liée à la sous-représentation des femmes dans l'organisation ». Elle fait l'objet des pires attaques allant de simples injures à de graves menaces anonymes. Plus grave, ses détracteurs vont même jusqu'à la filmer avec des téléphones portables au cours d'une collation donnée à l'hôtel Essafir par Me Bouchachi et diffuser ces enregistrements dans le but de la discréditer. « Ces procédés n'auraient jamais été utilisés si j'étais un homme, ce qui renforce ma conviction à poursuivre le combat et à pousser les femmes à prendre conscience de la situation. Une plainte a été déposée et l'enquête se poursuit », dit-elle. Force est de croire que l'élection d'un nouveau bureau du Conseil de l'Ordre des avocats d'Alger est loin de donner espoir à ceux qui croient à un quelconque changement allant dans le sens d'une vraie démocratie où l'égalité et l'équité sont garanties.