Implantée au milieu des montagnes boisées, face au mont du Zaccar (Miliana), la région de Hammam Righa aura été gâtée en fin de compte par la nature. La découverte de ses thermes remonte à l'an 44 avant J.-C. Cette station thermale du centre du pays culmine à 640 m d'altitude. Les températures de ses eaux salines sulfatées calciques varient entre 39° et 68°. Ses eaux sont d'ailleurs recommandées pour de multiples soins et indications thérapeutiques. En outre, la disponibilité des équipements spécialisés constitue un autre atout pour encourager les regroupements des équipes sportives dans ce lieu. La station thermale de Hammam Righa, grâce à son microclimat exceptionnel et son environnement paradisiaque, accueille les citoyens venant de plusieurs wilayas du pays, de l'étranger aussi, pour des traitements, durant toutes les saisons de l'année. La station thermale de Hammam Righa s'étend sur une superficie de 30 ha où s'érigent un hôtel de 30 chambres, trois blocs constitués d'appartements F3 et F4 et des structures pour la restauration, des cafétéria avec leurs terrasses, des saunas, des bassins collectifs pour les bains des hommes et des femmes, ainsi que les chambres individuelles dotées de baignoires. En 1991, la station thermale de Hammam Righa avait enregistré un résultat positif estimé à 4,5 millions de dinars. Après avoir survécu aux années du terrorisme, la comptabilité de ce même établissement enregistre un résultat négatif qui dépasse 37 millions de dinars, de surcroît le cumul de son déficit durant la période allant de 1992 à 2006 se chiffre à 400 millions de dinars. Les tarifs des services proposés aujourd'hui sont dérisoires, y compris pour les soins. La « vente » des eaux chaudes naturelles et le bien-être que procure cet endroit paradisiaque devaient en théorie épanouir et assurer un développement social et économique à la commune de Hammam Righa. Malheureusement, ce n'est pas le cas. Les habitants de la localité rurale de Hammam Righa vivent dans une grande précarité. La nouvelle équipe dirigeante de l'Entreprise de gestion touristique (EGT) Hammam Righa a entrepris beaucoup d'efforts et d'initiatives avec ses propres moyens jugés obsolètes, pour rayonner au milieu de cet environnement verdoyant. La station emploie 169 personnes, représentant une masse salariale mensuelle de 3,5 millions de dinars. Cela s'avère insuffisant pour une région qui a connu les affres du terrorisme et qui continue de souffrir des manques enregistrés dans la vie quotidienne. Pas d'eau, ni de routes, ni d'électricité mais le plus important, pas de travail. Les jeunes ignorent tout de la politique d'aide et de soutien à l'emploi proposée aux jeunes par l'Etat. Avant d'atteindre le hammam « Baraka », se trouvant à l'extérieur des bâtiments, au bas de l'hôtel Zaccar, il faut traverser un périmètre où s'érigent des locaux commerciaux infectes et un bidonville dans lequel règne la loi du silence. Les gardiens de parking, matraque à la main, orientent les véhicules vers « leurs territoires » pour le stationnement. Des « locaux de commerce » implantés le long des chemins étroits et sinueux des curistes entraînent les grappes humaines vers le bain « Baraka » de Sidi Slimane. Des airs musicaux divers qui se dégagent de ces « magasins » lugubres et pas du tout propres animent l'ambiance de ce « bidonville ». L'hygiène n'est pas à l'ordre du jour. Les amas d'ordures sont incontournables. Des marches d'escaliers couvertes de boue sont empruntées par les clients du hammam. L'omerta et l'urbanisation sauvage galopante ont totalement transformé cette partie de la superficie de la station thermale Hammam Righa. Chacun évite de traiter ce point sombre de cette destination touristique. L'eau chaude naturelle qui surgit des pierres se jette sur les bassins et produit un épais brouillard. Les « baigneurs » en sueur avaient l'air heureux. Le marabout de Sidi Slimane veille sur les lieux. Les récits et les légendes sur les prouesses du hammam « Baraka » sont nombreux, alors que les commerçants évoquent les miracles pour cultiver et attirer les touristes. La location journalière des chambres non équipées, identiques aux vestiaires, au nombre de 14 pour la partie réservée aux hommes dans cet espace traditionnel, est fixée à 620 DA. C'est pareil pour la partie réservée aux femmes. Le tarif de l'entrée à ces bassins du hammam « Baraka » est de 100 DA. Le coût d'un repas complet à l'hôtel Zaccar s'élève à 640 DA. Dans l'autre partie de cet établissement existe 112 bungalows. Il n'y a que 18 qui sont réservés lors de notre passage en cette fin du mois de décembre de l'année 2007. « Nous avons 40 bungalows réservés pour la deuxième semaine des vacances scolaires », nous déclare l'employé chargé de la réception. Quelques citernes sont « plantées » sur le sol. Un décor qui indique que les locataires doivent se soumettre à l'approvisionnement en eau. Une corvée pour les locataires de ces bungalows mal entretenus. « Ce qui est extraordinaire dans cette zone où se trouvent ces bungalows usés par le temps, c'est la présence de la végétation et des arbres, nous confie un ancien moudjahid qui réside à Alger. Je viens pour passer la journée dans cet endroit extraordinaire depuis 50 ans. Dommage qu'il s'est dégradé, mais que voulez-vous que je fasse. Je viens en compagnie de mes enfants et petits-enfants pour chercher l'évasion. Quand je veux prendre un bain, je vais à l'hôtel Zaccar, c'est plus pratique », conclut-il. Un nouveau plan de redressement En effet, les bungalows se trouvent dans un état qui mérite des travaux d'entretien et de réhabilitation au moment où la clientèle commence à reprendre confiance en se rendant à la station thermale après un « divorce » qui a duré plus d'une décennie. Les actes terroristes et criminels perpétrés dans cette zone de la wilaya de Aïn Defla, limitrophe avec la wilaya de Tipaza, ont fait fuir le personnel compétent de l'EGT-HR. Au bout de plusieurs années, sans tenir compte des critères, des promotions ont été accordées au profit de certains employés de la station thermale qui n'étaient pas en réalité qualifiés pour occuper leurs nouveaux postes. L'incompétence et la ruralisation ont mis à genou la gestion de la station thermale de Hammam Righa. Le directeur général de l'EGT Hammam Righa, Mouhoubi Nacer-Eddine, en poste depuis juillet 2006, un professionnel du secteur du tourisme qui a géré plusieurs entreprises du secteur, reconnaît que la tâche est très difficile. « Je savais à quoi je m'attendais après une période d'observation », nous déclare-t-il. « J'aime les défis et cette station commence à relever la tête. Avec un service personnalisé à la hauteur et la remise à niveau des structures, je suis persuadé que cette station thermale ne fera que procurer du bonheur à ses visiteurs », ajoute-t-il. Le plan de redressement élaboré par le premier responsable de l'EGT Hammam Righa s'étale de 2007 jusqu'à 2009. Il s'articule autour de la remise des infrastructures aux standings qui répondent aux exigences des marchés nationaux et internationaux, en matière d'hébergement, de restauration, de loisirs et de soins. Remettre de l'ordre, instaurer la discipline, veiller à l'organisation dans les travaux, insister sur la propreté des lieux d'une manière continue, mettre l'accent sur la vigilance et perpétuer un climat de sécurité à tous les niveaux de la station thermale... tels sont quelques axes d'intervention inscrits sur la feuille de route de cet établissement. Des travaux de réfection seront engagés au niveau de l'hôtel, des blocs d'appartements et enfin des 112 bungalows. Si les bains enregistrent des chiffres d'affaires encourageants, ce n'est pas encore le cas pour les structures d'hébergement et de restauration. Le taux d'occupation pour l'hébergement ne dépasse pas 33%. La panne des ascenseurs depuis des années au niveau des bâtiments est un handicap pour les personnes âgées. L'alimentation en eau fait encore défaut en raison de la vétusté du réseau de l'AEP. Il est surtout question de formation du personnel et de sa mise à niveau dans le plan de redressement établi par le gestionnaire de l'EGT-HR. Autant de points qui ressortent dans cette feuille de route qui ne peuvent se concrétiser si la situation financière demeure figée dans son état actuel. Même les créances de la station thermale n'ont pas été encaissées. Les institutions de l'Etat ne sont pas solvables envers l'EGT-HR. Cet établissement économique, dépendant de Gestour, agonise car le holding n'arrive pas à assainir et à soutenir ses complexes touristiques en difficulté à cause d'un passif catastrophique. Pourtant, l'on continue quand même à assurer des prestations au profit des assurés sociaux à des prix très bas. L'autre endroit dénommé Hammam Aïn Toulba, pourvu d'une piscine couverte et des bains à l'eau chaude naturelle, ouvre ses portes durant le week-end. Le fameux et légendaire Grand Hôtel aura été entièrement rasé par les séismes, l'érosion et l'inconscience humaine. Des effets dévastateurs et destructeurs qui n'ont laissé apparaître sur place que des souvenirs, des vestiges et des arbres centenaires qui renseignent sur les passages des civilisations qui ont séjourné sur cet bel et agréable endroit. En revanche, le hammam Belle Vue, qui garde toujours sa merveilleuse architecture, a été fermé à la suite des réserves formulées par les services du CTC. Les bains et les chambres de ce hammam se trouvent dans un état lamentable alors que les risques d'effondrement d'un étage sont réels. Depuis la terrasse du hammam Belle Vue, la vue est imprenable puisque l'on peut dominer la vallée du Dahra qui nous courtise d'ailleurs en cette journée ensoleillée et nous permet de voir défiler à perte de vue une série de paysages fabuleux. Chaque personne respire l'air propre et sain produit par les monts du Dahra. La station thermale de Hammam Righa, gâtée par la nature qui veut faire vivre dans le confort ses visiteurs sans mettre en péril l'environnement naturel, mérite plus de considération et de soutien. Sans les moyens financiers adéquats, les bonnes volontés affichées par la nouvelle équipe dirigeante de l'EGT-HR s'essouffleront sans aucun doute à court terme et ce joyau du tourisme thermal qui avait marqué les esprits dans le passé risque de disparaître.