La conférence organisée jeudi après-midi au centre Pierre Claverie de l'évêché d'Oran sur le thème de « Germaine Tillion et l'Algérie » a suscité un riche débat animé par Abdelkrim Elaidi, professeur de sociologie à l'université d'Oran Es-Senia. C'est un auditoire composé d'étudiants, d'enseignants, d'avocats et de sociétaires qui a suivi l'intervention du conférencier et la projection d'un film documentaire réalisé par la chaîne thématique « Histoire » sur cette dame âgée de cent ans actuellement, et dont le parcours en Algérie est très peu connu. En fait, Germaine Tillion a séjourné à plusieurs reprises en Algérie, lorsque toute jeune boursière, elle a planté sa tente dans la dechra de Ahmar El-Khald au sud des monts des Aurès, dans le cadre des travaux de recherches sur la condition féminine en Algérie entre 1934 et 1940, durant la Deuxième Guerre mondiale et quatorze ans après, en 1954, au début du déclenchement de la guerre de Libération nationale. Cette ethnologue, qui a connu Mouloud Feraoun pour l'avoir encouragé à entreprendre sa thèse de doctorat sur le poète Si Mohand U Mhand, a sauvé de la guillotine le moudjahid feu Rabah Bitat, elle a porté un regard positif sur la création des centres sociaux dans les douars pour soulager la misère des « indigènes ». Elle était aussi très proche des hommes d'Etat comme Jacques Soustelle et Robert Lacoste, ardents défenseurs de l'Algérie française. Cependant, Germaine Tillion a également connu les affres de l'occupation nazie de la France vichyste, quand elle fut une militante active dans les réseaux de la résistance avant d'être déportée dans le camp de concentration de Ravensbrück. Elle a connu Albert Camus qu'elle a rencontré à Alger en 1955, Max Marchand le pédagogue qui lutta de toutes ses forces pour la promotion des jeunes algériens et qui a été assassiné par l'OAS avec d'autres compagnons de l'éducation nationale, Yacef Saâdi, héros de La Bataille d'Alger et d'autres personnages des hameaux épars dans les Aurès. Le conférencier, tout en se défendant de ne pas tout connaître de cette ethnologue qui a écrit une œuvre intitulée Le harem et les cousins, fruit de son séjour chez les Chaouias, un livre sur la structure familiale et les mariages consanguins, qui a suscité des réactions controversées auprès des intellectuels français et surtout les féministes de l'Hexagone, a rappelé certaines citations d'éminents sociologues français et auteurs algériens sur la culture de la domination masculine en Algérie mise en avant dans cette œuvre de référence. La projection d'un long documentaire a permis à l'assistance de mieux connaître le parcours de cette dame au franc-parler, née en mai 1907 dans le Haut Loiret et qui vit actuellement dans la banlieue parisienne. Dans une longue interview de l'auteur réalisée par la chaîne thématique « Histoire », elle parlera surtout de ses séjours en Algérie, des événements marquants de la Guerre d'indépendance et la place qu'a occupée la femme algérienne durant les huit années de combats sanglants mené par le peuple pour recouvrer sa liberté. Le Centre Pierre Claverie a abrité le lundi 21 janvier une rencontre sur « Georges Anawati, un chrétien égyptien à la rencontre de l'islam », thème d'une conférence qui a été animée par Jean-Jacques Perennes, dominicain, auteur de la biographie de l'Evêque d'Oran, feu Pierre Claverie, victime du terrorisme.