Le jeune cinéaste algérien Abdenour Zahzah a projeté au cours du mois de janvier son denier film documentaire : Maurice Pons, l'écrivain de l'étrange, à la grande médiathèque Fellini de la ville de Montpellier. Cette projection s'inscrit dans la continuité du Festival du cinéma méditerranéen qui peut vivre ainsi toute l'année, en proposant des œuvres qui n'ont pu être projetées au moment de son déroulement. Lors des débats, Abdenour Zahzah a déclaré que l'idée de ce film est née d'une rencontre heureuse et fortuite avec un écrivain très discret malgré une œuvre à la qualité littéraire insoupçonnable. La genèse du projet remonte à 2004, l'année où le cinéaste a bénéficié d'une résidence pour créateurs dans le cadre féérique du moulin d'Andé dans l'Eure. Ce lieu, qui ressemble à une peinture flamande, est un point de chute pour tous les artistes qui ont un projet d'écriture, de film ou de musique. A son arrivée à la gare du moulin d'Andé, le cinéaste a été accueilli par un vieux monsieur qu'il avait pris pour le chauffeur de la résidence. Ce qui a intrigué le plus Zahzah, c'est le comportement de ce personnage dans la voiture et les simagrées qu'il faisait tout au long du trajet reliant la gare au moulin. En effet, il n'arrêtait pas d'imiter le bruit que faisait la voiture comme le font si bien les enfants quand ils jouent au chauffeur. Arrivé à bon port, il demande après ce personnage original et on lui répond qu'il s'agit de l'écrivain Maurice Pons qui vit dans le moulin d'Andé depuis plus de cinquante ans. Poussé par la curiosité, Zahzah va lire l'essentiel de l'œuvre de Maurice Pons. Un écrivain qui a commencé sa carrière littéraire en 1951 en publiant Métrobate chez René Julliard qui avait à l'époque une prédilection pour les jeunes talents. C'est grâce à lui que notre académicienne Assia Djebar a publié son premier roman La soif. En 1959, son recueil de nouvelles Virginales sera adapté au cinéma par François Truffaut et deviendra Les Mistons. En pleine guerre d'Algérie, Maurice Pons signe l'appel des 121 intellectuels français de 1960 qui demandent le retrait de l'armée française et l'accession de l'Algérie à son indépendance. De cette époque trouble et de ses sympathies pour le réseau des Porteurs de valises de Francis Jeanson, il tirera un roman intitulé Le passager de la nuit qui décrit les péripéties d'un nationaliste algérien qui traverse la France pour se rendre en Suisse et échapper à la traque policière. Le film documentaire de Zahzah a tenu en haleine le public de Montpellier par la beauté des images et le témoignage pertinent de Maurice Pons. Fait en un temps record, quatre jours de tournage avec une seule caméra, il prouve qu'un travail de qualité est possible quand deux talents s'associent dans un même but esthétique.