Les syndicats autonomes attaquent sur tous les fronts en vue de faire entendre leur voix. Ils veulent être intégrés dans le débat national, associés au dialogue social, consultés au même titre que l'UGTA et reconnus à part entière. Leurs revendications, outre leurs doléances propres aux problèmes vécus dans les secteurs qu'ils représentent, sont d'abord la reconnaissance du pluralisme syndical, le respect du droit et des libertés syndicales. Ils sont neuf à activer fortement sur le terrain. Ils occupent ces derniers temps la scène sociale en observant des grèves cycliques, tenant des conférences et dénonçant le verrouillage des espaces d'expression syndicale. Pour coordonner leurs efforts autour d'une seule « cause », celle d'en finir avec le monopole syndical opéré par l'UGTA, les syndicats autonomes créent un « espace de concertation, d'orientation et de réflexion ». Espace structuré au sein de ce qu'ils appellent « Le Comité national des libertés syndicales (CNLS) ». Ce dernier regroupe neuf syndicats, à savoir le CNAPEST, le CLA, le SATEF, le SNPSP, le SNPSSP, le SNOMMAR, le SNMASM et enfin le SNPDSM. Activant chacun dans son secteur, les syndicats autonomes ont fini par s'imposer sur la scène de la « réalité », grâce à leurs capacités mobilisatrices. Mohamed Khendek, secrétaire général du SNPSSP, parle de 35 wilayas où sa structure est représentée. « Sur l'ensemble des praticiens spécialistes de la santé qui sont de l'ordre de 4600, nous avons près de 3200 qui ont adhéré à notre syndicat. Mais nos mouvements de grève sont suivis même par ceux qui n'adhérent pas à notre syndicat », précise-t-il. Pour le SATEF, la question de représentativité des syndicats autonomes est prouvée par la réussite des mouvements de grève. Chaque fois que l'un de ces syndicats appelle au débrayage, c'est tout le secteur qui est paralysé. « Nous n'avons pas besoin de donner des chiffres sur le nombre de nos adhérents pour avoir la légitimité de les représenter. Il n'y a pas mieux que les démonstrations faites sur le terrain de la lutte syndicale », souligne Sadali Mohamed-Salem, secrétaire général du SATEF. Les syndicats de l'éducation nous renvoient à la grève de l'année dernière qui a paralysé les lycées de l'Algérie à telle enseigne que le ministre de l'Education a menacé de recourir au remplacement des enseignants grévistes dans l'espoir d'obtenir la suspension de la grève. Outre ce fait, les syndicats autonomes disent n'avoir jamais l'intention de dénier le droit au syndicat historique de « parler au nom de ses représentants ». Mais pour eux le débat se situe ailleurs. D'abord, ils condamnent le fait que l'administration refuse d'accorder l'agrément à des embryons de syndicats, dans l'esprit de la reconnaissance du droit syndical de tous et pour tous. Sur cette question, le ministre du Travail s'est montré catégorique. Dans une déclaration hier à El Watan, Tayeb Louh a récusé les « allégations » de certains syndicats concernant le refus du ministère de leur octroyer l'agrément et de les légaliser. « Tous les syndicats ayant déposé leurs dossiers complets de demande d'agrément et conformément aux lois régissant l'activité syndicale ont obtenu leur agrément », a-t-il attesté. M. Louh dit qu'il faut qu'on soit « francs et sérieux ». « Je l'ai précisé à maintes reprises, le CNAPEST a déposé un dossier incomplet. On l'a saisi par lettre, où on lui a signifié les pièces manquantes qu'il devait fournir. Jusque-là, il n'a rien fait », ajoutera-t-il. Revenant sur « les entraves au travail syndical », le ministre du Travail a précisé que « le droit de grève est constitutionnellement reconnu, seulement qu'il doit être exercé dans le cadre de la loi. Dans le cas contraire, comme tout citoyen, l'administration se trouvera dans l'obligation de saisir la justice pour rendre les choses à leur cours normal. Il y a un principe fondamental sur lequel je crois que tout le monde est d'accord, c'est le respect des lois de la République. Tout ce qui sort de ce cadre est considéré comme étant de l'anarchie ». Le ministre rejette, par ailleurs, le qualificatif de « syndicat autonome, car pour lui, il y a un "syndicat" tout court ».