Le programme du 45e Festival international du film de Salonique (Thessalonique) comporte 200 films, parmi lesquels 14 premières et secondes œuvres en compétition officielle. Le vainqueur recevra 36 000 euros avec le trophée Alexandre d'or des mains de Milos Jancos, président du jury. Une compétition nationale concerne les vingt longs Pétrages grecs et les quatre documentaires produits cette année. Ce qui prouve bien que le cinéma grec traverse une bonne période. Elena de Theo Angelopoulos a connu un succès public considérable avec 300 000 entrées dès la première semaine de sa sortie commerciale en Grèce. D'autres œuvres signées par des cinéastes grecs de premier plan sont montrées dans le programme (films de Pantelis Voulgaris, Nikos Parayotopoulos, Staoros Tsiolis). Salonique présente aussi beaucoup de films de la région des Balkans, un cinéma qui fait parler de lui, grâce à des réalisateurs de grand talent comme le Turc Zéki Demirkabuz et sa jeune compatriote Yesim Ustaoglu. L'actrice française Isabelle Huppert a fait l'objet au Festival de Salonique d'une attention très particulière. Bousculades aux portes de la salle Olympion, qui surplombe la grande statue d'Aristote, pour voir « la » Huppert en chair et en os recevoir des mains du directeur du festival Michel Demopolouser le trophée d'honneur et ensuite assister à la projection de son dernier film où elle est une bourgeoise étouffant sous les conventions face à sa sœur provinciale totalement délurée. Attention toute particulière aussi pour Abbas Kiarostami et la rétrospective qui lui est consacrée (films de fiction, documentaires, expositions photos). Si le cinéma algérien demeurait un mystère pour le public grec, ce n'est plus le cas. Salonique lève un coin du voile en maintenant Viva Laldjérie, de Nadir Moknèche, dans la compétition. Cette œuvre, qui a une forme, un style particuliers a beaucoup passionné les spectateurs. Le rythme moderne aussi bien que le mélange de gaieté et de tristesse, de douleur et d'éclats de rire, de provocation sexuelle (soft) et de mélo confucéen, tout cela a touché les Grecs. Mais sans doute aussi, il existe entre notre pays et la Grèce, des ondes souterraines. Comme entre deux pays méditerranéens face aux mêmes problèmes de notre temps, et où les choses humaines, urbaines, les espaces physiques et les émotions intérieures sont plus ou moins pareils. Cette année encore, le festival de Salonique se déroule sur les jetées même du grand port où des hangars de la gare maritime ont été transformés en centre cinématographique très accueillant. Tout autour, il y a, à perte de vue, la mer Egée et un fourmillement de ferries en partance pour les Cyclades tandis que d'énormes tankers et des navires marchands mouillent au large, attendant de rallier Shanghaï au Port Saïd. Le Festival de Salonique nous amène aussi au Japon avec les films du genre fantastique de Kiyoshi Kurosawa. Atypique, tournant des films de série B ou Yakuza (violence à chaque image) et d'autres films plus sérieux, des analyses politiques de la société japonaise, Kiyoshi Kurosawa commence aussi à faire beaucoup parler de lui au même titre que Takeshi Kitano... Bref, un cinéaste tout à fait différent de Abbas Kiarostami ! Le grand cinéaste persan était présent à Salonique et avec sa modestie habituelle a pu constater que les salles où passait sa rétrospective étaient assiégées par les cinéphiles qui ont vu tour à tour Le coût des cerises, palme d'or à Cannes en 1997, Closeup, Le Vent nous emportera, Où est la maison de mon ami ? Ainsi que ses films les plus récents comme les anciens documentaires qu'il faisait en travaillant au Kanoon (Centre de développement intellectuel des enfants). Si le cinéma iranien a pris son envol, ces dernières années, malgré la chape de plan du régime des mollahs, il le doit surtout à l'investissement privé. Grâce à cela, vingt nouveaux jeunes cinéastes iraniens tentent leur chance chaque année sur le marché et à travers les festivals internationaux comme Salonique.