Au deuxième jour du débrayage lancé par la Coordination nationale des syndicats autonomes de la Fonction publique, les animateurs de ce mouvement de trois jours ont affiché, en dépit des pressions et de certains dépassements, leur entière satisfaction quant au succès enregistré sur le terrain par leur action. Les réticents se sont joints hier à la protesta, gonflant ainsi les rangs des mécontents accusés par le premier responsable de l'Exécutif d'être des agitateurs infondés. « Les agitateurs » ont pu ainsi paralyser plusieurs secteurs d'activités à travers le territoire national. Les fonctionnaires de la santé, de l'enseignement supérieur, de l'éducation et de l'administration ont préféré répondre pacifiquement à M. Belkhadem dont le comportement est synonyme de panique. Ils étaient très nombreux à se rendre sur leur lieu de travail et observer des piquets de grève, des sit-in ou alors des assemblées générales. A l'unanimité, les propos des protestataires convergent vers le même sens. Ils estiment que les augmentations insignifiantes, dont parlent le chef du gouvernement et le patron de l'UGTA, sont déjà absorbées par une inflation. Pour preuve : les prix de plusieurs produits de base ont connu des augmentations à trois reprises durant ce mois de février. « M. Belkhadem devrait faire de temps en temps le marché pour s'imprégner de la réalité du pouvoir d'achat », a suggéré un fonctionnaire déplorant par-là même l'attitude de Sidi Saïd, responsable de la centrale syndicale. Dans ce sillage, M. Mériane, porte-parole de la coordination, a condamné les propos tenus avant-hier par Sidi Saïd. En déclarant que les ouvriers devraient applaudir la nouvelle grille des salaires et ne pas recourir au débrayage, le patron de l'UGTA se trompe carrément d'époque et d'ère. « A ces personnes et à celles qui ont dévasté le terrain légué par le grand homme qu'était Aïssat Idir qui doit, aujourd'hui, se retourner dans sa tombe, les déclarations de Sidi Saïd n'honorent pas le combat syndical », a déploré notre interlocuteur qui recentre le débat sur la question relative au régime indemnitaire. A ce propos, il a regretté le fait que l'on ne parle pas du régime indemnitaire, alors que le statut général de la Fonction publique, la grille des salaires et les statuts particuliers sont finalisés ou en voie de l'être. « Dans l'état actuel, il est incorrect et insensé de parler d'augmentation de salaire en occultant le régime indemnitaire. Sans ce dernier élément, nous ne saurons jamais si l'on a été augmenté ou pas », a expliqué le porte-parole de la coordination qui a tenu à signaler la paralysie totale de la ville de Chlef. Revenant au secteur de la santé et la décision du ministère de poursuivre en justice les quatre syndicats, M. Mériane a précisé que les hospitalo-universitaires et les docents ont reçu dimanche soir une convocation pour comparaître devant le juge. Les concernés se sont déplacés hier accompagnés de leurs avocats à la cour d'Alger, l'affaire a été jugée, mais le verdict ne leur a pas été notifié, d'où la poursuite de la grève à leur niveau. Et ce, en dépit des pressions exercées par certaines administrations sur le personnel médical. Par ailleurs, au moment où le ministre de la Santé attaque en justice les syndicats de son secteur, celui de l'enseignement supérieur appelle les siens au dialogue. Cette invitation a été accueillie favorablement par M. Rahmani, secrétaire général du Cnes qui consultera la base pour débattre de la démarche à suivre. « La mobilisation des fonctionnaires est très forte, elle le restera car ils en ont toujours ras-le-bol des promesses et des engagements non respectés. Si le ministre accepte de nous associer au débat sur le régime indemnitaire, nous sommes pour. Nous souhaitons qu'il concrétise localement nos revendications... », a plaidé M. Rahmani, affirmant que les syndicats autonomes ne cherchent pas l'affrontement, mais plutôt des solutions pour améliorer les conditions socioprofessionnelles des travailleurs. Sur un autre plan, ce dernier a tenu à dénoncer et à condamner le comportement de l'adjoint du directeur chargé de la recherche au centre universitaire de Khenchela. Après une altercation avec le représentant de la section Cnes, cet adjoint a déposé plainte contre l'enseignant qui a été immédiatement mis en prison où il a passé la nuit avant d'être libéré hier matin. Notre interlocuteur a déploré également les agissements de l'administration qui a tenté d'intimider les fonctionnaires en leur remettant des questionnaires. « La grève est un droit et les fonctionnaires lancent à travers ce débrayage un cri d'alarme et un signal fort aux pouvoirs publics pour l'ouverture d'un dialogue relatif à leurs revendications. Ils n'ont pas besoin de matraque et de déclarations insultantes... », a tonné M. Rahmani.