La communauté algérienne établie au Maroc, notamment dans l'Oriental (Oujda, Ahfir, Taza et Fes) semble partagée quant à une éventuelle réouverture des frontières Oujda (Maroc). de notre envoyé spécial Samedi, 22 mars. 14 h, heure marocaine. Quartier Lazaré. Des compatriotes établis à Oujda sont au rendez-vous. C'est que la journée est particulière. Le communiqué du ministère des Affaires Etrangères, tendant la main à l'Algérie pour une éventuelle réouverture des frontières terrestres, génère, quarante huit heures après sa publication, mille et un commentaires… optimistes pour les uns, moins pour les autres. Ahmed, gérant d'un hôtel, dit, quelque peu sceptique : « A chaud, c'est difficile d'émettre un avis censé, vous savez, il faut toujours se méfier de ces sorties médiatiques chérifiennes. Les gens ici sont versatiles et ils fonctionnent comme le chien de Pavlov (l'expression n'est pas dégradante). Aujourd'hui, comme vous le remarquez, tout le monde vante le rapprochement entre nos deux pays, mais il suffit d'une simple déclaration officielle de nos responsables, jugée désobligeante par les Marocains, pour que l'hostilité refasse surface. Moi en tout cas, même si, pour retourner au pays rendre visite à mes proches à Sidi Bel Abbes, je dois me rendre jusqu'à Casa pour prendre l'avion sur Oran, puis continuer par taxi jusqu'à ma ville natale, je ne souhaite pas une réouverture des frontières ». Quatorze ans plus tard Ali, de Tlemcen, abonde dans le même sens : « Ce n'est pas de l'animosité ou de la rancoeur, mais l'on n'oublie toujours pas l'été 1994 où l'Algérie avait été réduit à moins que rien. Je me souviens toujours de nos concitoyens touristes qui étaient chassés du territoire marocain comme des malfrats. Quatorze ans plus tard, les Marocains se sont rendus compte de l'erreur qu'ils avaient commise avec nous, alors, et c'est de leurs us, ils reviennent à de meilleurs sentiments, mais ce n'est jamais sincère. Nous cohabitons avec eux et je sais de quoi je parle ». Un vent léger s'est levé sur le quartier Lazaré, comme si les diables approuvaient les dires de nos deux interlocuteurs. Hamza, commerçant qui se dit de Aïn Témouchent, marié à une Marocaine, ne partage pas ce point de vue : « On devrait oublier cette année 1994, sinon, je ne me sens pas rejeté, ni banni par la population ici. Je vis en symbiose avec elle. Je dirais que c'est presque normal que cette passion existe entre nous, vu tout ce qui s'est passé entre nous, et puis, c'est quoi cette contradiction, il existe bien des avions qui relient les deux pays, des milliers de personnes passent quotidiennement au Maroc comme en Algérie, avec la bénédiction des garde-frontières des deux pays, et les frontières demeurent toujours fermées ? C'est absurde ! » Comme est absurde ce « souk El fellah de Oujda », comme dénommé ici par les Oujdis, où les produits algériens y sont vendus à bas prix. Le ciel annonce des pluies imminentes. Ahmed, Ali et Hamza nous disent avec le sourire : « en tout cas, rien ne nous empêchera de prendre un café, à tout moment, à Maghnia. Et qu'importe si les barrières ne sont pas levées… »