Etait-il en possession de toutes ses facultés mentales lorsqu'il a commis le crime ? C'est à cette question que la chambre criminelle de la cour d'Alger a tenté de répondre lors du procès le 24 mars dernier. Le mis en cause est un homme de 36 ans. Il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle. Si le prévenu semblait évasif, la défense, elle, « reçoit la douche froide de sa vie ». Elle ne s'attendait pas à une telle peine d'autant plus que son mandant, plaide-t-elle, est un homme malade. « Nous allons pourvoir ce verdict en cassation », commente, à chaud, l'avocat de la défense, Me Lakhdar Debbache à notre adresse. « Nous irons à la Cour suprême qui devra statuer sur ce cas, une fois l'affaire enrôlée. Nous espérons qu'à ce niveau de la juridiction algérienne, nous obtiendrons gain de cause, c'est-à-dire la révision du procès », ajoute l'avocat au sortir de l'audience. L'accusé qui a plaidé coupable doit « expliquer » pourquoi il a mis le feu « volontairement » chez son grand-père maternel. D'après l'arrêt de renvoi, des mobiliers ont pris feu ainsi qu'une pile de documents et de vieux journaux. « Je voulais savoir si j'étais en mesure de supporter le feu en y mettant les mains », explique naïvement l'accusé. Il n'a pas nié les faits qui lui sont reprochés. D'ailleurs sur conseil de son avocat, il a même plaidé coupable. La partie plaignante, à savoir le grand-père maternel, n'a pas été tendre envers le petit-fils :« Il voulait me tuer. En mettant le feu à la maison, cet homme cherchait à me nuire. » Ce dernier vivait sous le toit de son grand-père depuis sa tendre enfance. Le prévenu avait deux ans lorsqu'il fut recueilli par le vieil homme. Les parents venaient de divorcer, la mère devait retourner au bercail, c'est-à-dire la maison parentale, avant de convoler de nouveau. Encore bébé, l'homme, accusé aujourd'hui de délit d'incendie volontaire, a grandi dans les bras de son papy. Il le considérait comme son propre père, quant à son géniteur, il ne l'a presque pas connu. « Comment se fait-il que l'on soit amené à nuire à une personne si proche ? Un grand-père qui assurait le rôle d'un véritable papa ? Je demande à la cour de prendre en considération le fait que mon mandant était dépressif au moment des faits. Il sort à peine d'une opération compliquée. Il avait un cancer au cerveau. D'ailleurs parmi les papiers brûlés, il y a son dossier d'hospitalisation. En outre, il avait pris la chose à la légère, puisqu'il n'a pas pris la fuite. Il est resté sur place », argumente l'avocat. La requête de la défense ne sera pas prise en ligne de compte. La cour déclare se fier à l'expertise du psychiatre agréé près la cour d'Alger. L'expertise déclare que le sujet était sain d'esprit au moment des faits. Le procureur requiert 15 ans de réclusion. Après délibération, la cour annonce la sentence : 10 ans de prison ferme. L'accusé ne bronche pas. L'air absent, il quitte la salle pour rejoindre la maison d'arrêt d'El Harrach, où il y est détenu depuis juin 2007.